Литмир - Электронная Библиотека
Содержание  
A
A

– Ce n'est qu'une question de méthode, éluda le commissaire. Voulez-vous savoir comment on retrouve une aiguille dans une meule de foin? Simplement en mettant le feu à la meule, puis en passant un aimant dans les cendres.

219. ENCYCLOPEDIE

MANIPULATION DES AUTRES: L'EXPÉRIENCE DU PROFESSEUR ASCH: En 1961, le professeur américain Asch a rassemblé sept personnes dans une pièce. On leur a signalé qu'on allait les soumettre à une expérience sur les perceptions. En réalité sur les sept individus un seul était testé. Les six autres étaient des assis tants payés pour induire en erreur le véritable sujet de l'expérience.

Au mur était dessinée une ligne de vingt-cinq centimètres et une autre de trente centimètres. Les lignes étant parallèles, il était évident que celle de trente était la plus longue. Le professeur Asch demanda à chacun quelle ligne était la plus longue, et les six assistants répondirent invariablement que c'était celle de vingt-cinq centimètres. Quand on questionnait enfin le vrai sujet de l'expérience, dans 60% des cas, il affirmait lui aussi que celle de vingt-cinq centimètres était la plus longue. S'il choisissait celle de trente centimètres, les six assistants se moquaient de lui et, sous une telle pression, 30 % finissaient par admettre s'être trompés. L'expérience reproduite sur une centaine d'étudiants et de professeurs d'université (donc un public pas spécialement crédule), il s'avéra que neuf personnes sur dix finissaient par être convaincues que la ligne de vingt-cinq centimètres était plus longue que celle de trente.

Et si le professeur Asch leur reposait plusieurs fois la question, beaucoup défendaient ce point de vue avec vigueur, s'étonnant qu'il insiste. Le plus surprenant est que lorsqu'on leur révélait le sens du test et le fait que les six autres participants jouaient un rôle, il y en avait encore 10 % qui maintenaient que la ligne de vingt-cinq centimètres était la plus longue.

Quant à ceux qui étaient obligés d'admettre leur erreur, ils trouvaient toutes sortes d'excuses: problème de vision, ou angle d'observation trompeur

Edmond Wells, Encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu, tome III.

220. TENACE

Tous ses sens en alerte, Maximilien retourna à l'emplacement de la pyramide recouverte de terre. Il descendit dans la cuvette sous la colline cernée de ronces et retrouva le ravin débouchant sur le tunnel. Une lampe de poche entre les dents, il rampa pour rejoindre la porte métallique.

Il y avait toujours le Digicode avec la plaque métallique et son énigme sur les huit triangles et les six allumettes; c'était inutile maintenant: après la capitulation des insurgés, les hommes du commissaire avaient tout bonnement ouvert la porte au chalumeau.

Lors de cette première perquisition, les policiers avaient saisi toutes les machines. Ils avaient transporté un lourd matériel et, fatigués, n'avaient pas poussé plus loin leur inspection. La deuxième perquisition ordonnée par le juge d'instruction avait permis à l'avocat général de faire une seconde récolte, mais Maximilien constata que beaucoup d'objets traînaient encore sur les lieux.

La pyramide n'avait sûrement pas livré tous ses secrets. Le cas échéant, il rappellerait bulldozers et artificiers et réduirait le bâtiment en miettes. Il éclaira de sa torche le lieu abandonné.

Regarder. Observer. Écouter. Sentir. Réfléchir.

Soudain, ses yeux, son sens privilégié, furent attirés par… une fourmi. Elle cheminait dans le coin de l'aquarium qui avait servi à dialoguer avec la machine «Pierre de Rosette». L'insecte s'engagea dans un tuyau de plastique transparent qui s'enfonçait dans… le sol.

Discrètement Maximilien la suivit. La fourmi descendait sans savoir qu'elle conduisait le loup dans la bergerie. Simple question de myopie, la fourmi était incapable de voir l'infïniment grand. Son ennemi était si proche, si gigantesque, qu'elle ne se rendait absolument pas compte de sa présence. En plus, le tuyau l'empêchait de percevoir l'odeur de l'immense menace doigtesque.

Avec son canif, Maximilien trancha le tuyau au ras du sol et approcha son œil, puis son oreille du bord du trou. Il perçut des lumières lointaines, entendit des bruits. Comment descendre là-dessous? Il faudrait de la dynamite pour faire sauter cette dalle épaisse.

Il tourna nerveusement dans la pièce. Il sentait la révélation proche. Il lui manquait un élément de compréhension. Il y avait énigme, donc il y avait solution.

Il monta dans les étages, examina tous les objets. Il entra dans une salle de bains, se rafraîchit. Il s'observa dans le miroir. Il baissa le regard et vit un savon triangulaire.

Le miroir…

Regarder. Observer. Écouter. Sentir… Réfléchir.

Ré… fié… chir.

Maximilien éclata de rire, seul dans la pyramide abandonnée.

Elle était si évidente, la solution!

Comment construit-on huit triangles équilatéraux de tailles égales avec seulement six allumettes? Simplement en posant la pyramide, le tétraèdre plutôt, sur un miroir. Il sortit sa boîte d'allumettes, composa la forme et la plaça sur le miroir.

Reproduite à l'envers, la pyramide donnait un losange en volume.

Il se souvint de la progression de «Piège à réflexion». Première énigme: «faire quatre triangles avec six allumettes». On obtenait ainsi une pyramide. C'était le premier pas, la découverte du relief.

Deuxième énigme: «faire six triangles avec six allumettes». C'était la fusion des complémentaires, le triangle du bas et le triangle du haut. Le second pas.

Troisième énigme: «faire huit triangles avec six allumettes». Il suffisait de poursuivre la pénétration du triangle du bas dans le triangle du haut et on obtenait le troisième pas: une pyramide posée sur un miroir, donc deux pyramides, une à l'envers, une à l'endroit, formant une sorte de losange en volume.

L'évolution du triangle… L'évolution du savoir. Il y avait donc une pyramide à l'envers sous la pyramide à l'endroit… et le tout formait un gigantesque dé à six faces.

Vivement, il arracha toutes les moquettes et trouva enfin une trappe en acier. Il y avait une poignée, il la tira et découvrit un escalier.

Il éteignit sa torche devenue inutile. À l'intérieur, tout était lumineux.

221. ENCYCLOPÉDIE

STADE DU MIROIR: À douze mois, le bébé traverse une phase étrange: le stade du miroir, Auparavant, l'enfant croyait que sa mère, lui-même, le sein, le biberon, la lumière, son père, ses mains, l'univers et ses jouets ne faisaient qu'un. Tout était en lui. Pour un bébé, il n'y a aucune différence entre ce qui est grand et ce qui est petit, ce qui est avant et ce qui est après. Tout est en un et tout est en lui. Survient alors le stade du miroir. À un an, l'enfant commence à se tenir debout, la motricité de sa main gagne en habileté, il parvient à surmonter les besoins qui auparavant le submergeaient. Le miroir va maintenant lui indiquer qu'il existe et qu'il y a d'autres humains et un monde autour de lui. Le miroir va alors entraîner soit une socialisation, soit un refermement. L'enfant se reconnaît, se fait une image de lui qu'il apprécie ou n'apprécie pas, l'effet est tout de suite visible. Soit il se fait des câlins dans la glace, s'embrasse, rit à gorge déployée, soit il s'envoie des grimaces.

Généralement, il s'identifie comme étant une image idéale. Il tombera amoureux de lui-même, il s'adorera. Épris de son image, il se projettera dans l'imaginaire et s'identifiera à un héros. Avec son imaginaire développé par le miroir, il commencera à supporter la vie, source permanente de frustrations. Il supportera même de ne pas être le maître du monde.

Même si l'enfant ne découvre pas de miroir ou son reflet dans l'eau, il passera malgré tout par cette phase. Il trouvera un moyen de s'identifier et de s'isoler de l'univers, tout en comprenant qu'il doit le conquérir.

144
{"b":"102708","o":1}