Tout ce qui se passe ne m’ôte aucune de mes idées pour l’avenir; au contraire; et s’il faut te parler vrai, je ne suis pas fâché que ta sœur use un peu son cœur c’est un état que celui de l’amour, par lequel il faut passer tôt ou tard c’est une douce erreur à vingt ans; c’est une impardonnable folie à quarante. J’ai connu de ces dragons de vertu, qui tant qu’elles ont été aimables et jeunes, rebutaient tous les adorateurs: c’est qu’elles voyaient bien qu’il leur en reviendrait deux, pour un quelles renvoyaient, et elles se réservaient tout bas la liberté de choisir: mais quarante ans sont venus avec cette coquetterie; les amants ont disparu; il n’y a plus eu de choix à faire: alors, mes folles se sont éprises d’un jouvenceau, qui brûlait d’un feu de paille, qu’elles ont payé pour les tromper, et qui les a trompées. Si donc ta sœur n’a pas encore eu la petite vérole de l’amour, qu’elle l’aie: c’est mon avis.
P.-S. – Il reste entre les mains d’Ursule un certain consentement de tes parents, dont il faut te saisir par précaution.
Lettre 89. Le même, à Lagouache.
[Gaudet se sert aussi du fat qu’il méprise.].
Même jour.
Puisque vous avez le bonheur d’être aimé d’Ursule, monsieur, c’est la servir sans doute que d’entrer dans vos intérêts. Vous savez que j’y suis depuis longtemps: mais en cette occasion surtout, je dois vous en donner des preuves. Il s’agit de rendre heureuse la sœur de mon ami. Pour cela, il faut que vous la connaissiez parfaitement. Mlle Ursule est une fille haute, capricieuse, inconstante, et plus inconséquente encore. Il faut la mater pour son propre avantage, autant que pour le vôtre, et lui montrer ce que vous êtes, dès avant le mariage: car si vous attendiez après, et qu’elle se crût trompée, elle ne manquerait pas de moyens, pour secouer le joug, et de protections pour vous faire punir; outre que moi-même je prendrais alors son parti contre vous. Songez donc à vous conformer à ce que je vous prescris. Si vous l’avez réellement subjuguée, elle ne vous en sera que plus acquise; si vous n’avez fait sur elle qu’une impression légère, vous éviterez le malheur d’être un jour renfermé, dans le cas où vous viendriez à lui déplaire. L’intérêt que je prends à vous, m’engage à vous présenter les choses sous leur vrai point de vue. Je vous conseillerais de lui faire faire quelque démarche décisive, comme de quitter la maison de Mme Canon, pour aller avec vous: surtout disparaissez avec elle, pour qu’il n’y ait pas de doute; ces démarches inconsidérées de sa part seront un jour des armes contre elle entre vos mains. Marquez-moi, et sur-le-champ, à quel point vous en êtes avec elle. Il ne serait pas mal non plus que vous écrivissiez une lettre adressée à elle, mais qui tombât en d’autres mains, comme dans celles de Mlle Laure, par laquelle vous paraîtriez vous faire presser au sujet de l’enlèvement, ou de la fuite, comme vous voudrez. J’espère que vous vous conformerez en tout aux avis de.
Votre affectionné.
P.-S. – Renvoyez-moi ma lettre. Le conseil que je vous donne est de la plus grande conséquence: soit de ma part, soit de celle d’Ursule. Vous connaissez ma prudence, et mon pouvoir.
Lettre 90. Ursule, à Lagouache.
[Elle lui donne rendez-vous pour l’enlever.].
Trouve-toi ce soir avec un carrosse à la porte, de la maison: je descendrai sans bruit, entre dix, onze heures, ou minuit; mais sois prêt dès les dix heures. Mon frère s’est emparé, il n’y a qu’une heure, du consentement de mes parents, et il n’y a pas espérance de le ravoir de ses mains. Il y a toute apparence qu’il venait de recevoir une lettre, que je soupçonne de chez nous, de M. Gaudet, ou de Mme Parangon. Peut-être que demain il ne serait plus temps. J’emporterai avec moi ce que j’ai de plus précieux. Surtout ne manque pas!
À ce soir, mon ami.
Lettre 91. Réponse.
[Il répond d’après la lettre qu’il a reçue de Gaudet.].
Même jour.
Foin des fames depui que je te connes jé plu de cassetete qu’an toute ma vie vla quinz jour que tu me tourmente pour tanlevé ma foi anleve toi toi maime jé bel afaire dalé me faire des affaires acose de toi i lais vrai que je teme mes on a bo emer les jans cant ilia du risque serviteur inci giré si je peu ou sinon je niré pa ces bin drol qui falle faire tout ce que tu veu i fot faire oci un peu ce que je veu moi é jespaire que tu le fera cant nou ceron marié mes tais si joli qui fo bien te pardoné inci giré a leure dite mes ne me fet pas croqué le marmo pandan deuz heures o moins je t’embrasse.
LAGOUACHE.
P.-S. – De Laure, à laquelle cette lettre fut remise:
Je viens à l’instant de recevoir une lettre de M. Lagouache, qui m’est adressée, sous enveloppe, pour que je te la fasse parvenir, chère cousine: je l’ai copiée exactement dans sa belle orthographe, car je garde l’original, pour le montrer à M. Gaudet, et le faire rougir de son protégé. Je te demande pardon de cette petite liberté: mais il y a en vérité pour rire de ton choix! ton goût pour les beaux esprits, est décidé; te voilà Ninon! Adieu. Tu me feras savoir de tes nouvelles, j’espère? Je garde tous les secrets qu’on me confie; je divulgue tous ceux que j’attrape.
Lettre 92. Lagouache, à Pastourel, son ami.
[Il montre sa bassesse et sa poltronnerie.].
Même jour.
Ma foi cet a se soir que je la quiens com sa sera la nuit é con ne set pas se qui peut arriver trouve toi pas loin de sa porte pour que cil arivet queq chose jus quecun pour me secouri car voi tu ge ne me fi o fames que de la bonne sorte é puis son frere qui ais une lame dame i fot prande garde un peu a soi dan les cas com celui ou me voila i fodra avoir ave toi cin ou si de nos camarade je vous dedommageré de tout sa un queq jour je sui ben faché que tu naye pas été che toi je tores dit ben dote chose car je ne suis pas san zavoir de linquiétud o sujet de ce que tu me marquede Mr Godai qui ais un hom qui a lais bras lon gai peur qui gniait queq finece caché ladsous il y a oci le marqui de *** par tout sa i fo que mais bons zamis se trouve a porté de me secouri can ca cera fai ma foi vog la galair tan quel tan quel e vog la galair tan quel pourra voger la fill est riche queq j risque don.
LAGOUACHE.