(Ces mots sont ainsi abrégés dans l’original, et ils sont relatifs à des vues secrètes de Gaudet.).
P.-S. – J’ai oublié de répondre à l’article des lectures; je m’en aperçois ma lettre fermée. Mais il est trop important pour n’en rien dire: voici deux mots sur un papier séparé, que je glisse dans ma lettre.
Je ne vous ai conseillé que des lectures futiles et convenables à votre position. Aux femmes moins répandues que vous dans un certain monde, astreintes aux soins du ménage, il ne faut qu’un livre, la maison Rustique : si néanmoins elles sont des liseuses par goût, je leur accorderai la bibliothèque bleue , comme une très bonne lecture, à cause de la bonhomie qui y règne: surtout que leur Livre d’heures , soit en latin! il n’est pas nécessaire que les femmes entendent ce qu’elles demandent à Dieu: et voici tout ce qu’il leur convient de lui dire avec connaissance Mon Dieu! accordez-moi tout ce que désire mon mari!
Remarque. Que penser d’un pareil homme, qu’on va voir, dans la CXXIII ème lettre, élever des autels au saint législateur des chrétiens! M. Gaudet, pour le peindre d’une manière bien sentie, nous a paru avoir naturellement un bon cœur, une âme excellente; mais jeté malheureusement parmi des hommes sans mœurs, opprimé par un parent injuste, doué d’un tempérament ardent au plaisir, il a perdu de bonne heure toute estime pour les hommes, toute croyance; il a cherché à secouer toute espèce de frein, pour satisfaire ses passions. Cependant son âme, lorsqu’elle n’est pas courbée par l’orage, se redresse; elle se montre alors dans toute sa beauté; elle étonne. Dans les deux ouvrages dont il est l’âme, on doit remarquer que ce n’est pas un scélérat, quoiqu’il soit un corrupteur, caractère unique peut-être dans tous les ouvrages du genre de celui-ci: Gaudet est un véritable ami, et il perd la sœur et le frère; non par erreur, non par sottise, non par perfidie; il leur veut du bien; il veut les élever: mais n’étant pas retenu par la crainte salutaire d’un Dieu rémunérateur et vengeur, il vacille, il s’égare; il égare les autres: son âme forte prolonge son erreur; parce qu’il se croit toujours assez de moyens pour triompher des obstacles; il espère jusqu’au dernier moment, où surpris par un malheur imprévu, il se voit sans ressource: il succombe alors en héros païen, et fait regretter que ses grandes et belles qualités n’aient pas eu l’appui de la religion divine, faite pour le bonheur des hommes. Preuve évidente, sans réplique, sublime, qu’elle est nécessaire: c’est le fruit que le bon Pierre R** a prétendu que sa famille retirât de la lecture des lettres qui composent LE PAYSAN et LA PAYSANNE PERVERTIS. Je puis le dire, en qualité d’éditeur, et d’après quelques journalistes, ce double ouvrage est le plus frappant, dans son genre, le plus vaste, le plus fortement pensé, le plus naturel, qui ait encore paru.
L’Éditeur.