Traduit par Alexandra de Holstein et René Ghil «Будем как солнце! забудем о том…»/Soyons comme le soleil Soyons comme le Soleil! Oublions Qui nous mène sur la voie d'or. Souvenons-nous, avant tout, qu'éternellement vers autre chose, Vers le nouveau, le Fort, le Bien, le Mal, De geste éclatant nous nous emportons en un songe somptueux! Sans oubli! implorons le non-Terrestre En notre vouloir terrestre… Comme le Soleil, jeune toujours, Caressons les fleurs, les fleurs qui flamboient, L'air transparent, et tout ce qui est d'or! Es-tu heureux?… Sois deux fois plus heureux, Et sois l'incarnation du rêve soudain! Ah! ne pas t'attarder dans l'immobile! Plus loin, et loin! jusqu'à la limite sacrée, Plus loin nous attire le Terme fatidique: Dans l'Éternité, où de nouvelles corolles s'allumeront… Soyons comme le Soleil, il est jeune! Et en cela s'atteste l'ordre de la Beauté. Traduit par Alexandra de Holstein et René Ghil Завет бытия/Voix de la Nature Je demandais au vent toujours errant; Pour être jeune, oh! dis-le moi, que faire? Le libre vent me dit en folâtrant: «Sois comme l'air, ou la vapeur légère!» «Quel ordre», dis-je à l'Océan puissant, «Le créateur donna-t-il à la vie?» Et l'Océan, dit en se balançant: «Toujours, ainsi que Moi, sois pleine d'harmonie!» «Que faire», dis-je au soleil dans les cieux «Pour luire ainsi que l'aurore hâtive?» L'ardent soleil resta silencieux: «Enflamme-toi» comprit l'âme attentive. Traduit par Olga Lanceray Завет бытия /Testament de l'Être Au vent libre j'ai demandé: ― «Que dois-je faire afin de rester jeune?» Le vent badin m'a répondu: ― «Sois comme l'air et la fumée!» À la puissante Mer j'ai demandé: ― «En quoi peut consister le testament de l'Être?» La Mer retentissante alors m'a répondu: ― «Comme moi sois toujours sonore!» Au soleil haut, j'ai demandé: ― «Comment dépasser l'éclat de l'aurore?» Le soleil n'a rien répondu; Mais l'âme a su deviner: «Brûle!» Traduit par Philéas Lebesgue Черемуха/Les merisiers Nous étions tous les deux dans un beau rêve entrés, Les merisiers en fleur nous avaient enivrés. Et le matin brillait comme une mer immense Aux nuages légers. Parmi l'exubérance Des arbres et des fleurs, et de l'herbe, en ce jour Nous vivions inondés de couleurs et d'amour… Et, la main dans la main, rapprochant nos visages, Vibrant а l'unisson des fleurs et des ramages, Au soleil printanier, rayonnant des hauteurs, Nous étions éperdus, exaltés de bonheur. L'éternité régnait sur cette heure si brève, Le matin triomphait dans nos cœurs, dans nos rêves. Parmi les merisiers à l'arome enivrant, Nous étions tous les deux un reflet du printemps. Traduit par Katia Granoff
Золотая рыбка/Le poisson doré Au château était un bal joyeux, — Les musiciens chantaient. Une brise, au jardin, balançait Une balançoire légère. Au château, en un doux délire Chantait, chantait un violon! Au jardin, dans un étang, était Un poisson doré. Et sous la lune tournoyaient, Comme s'ils fussent ajourés, Par le printemps enivrés Les papillons nocturnes. L'étang balançait en soi, une étoile. Les herbes souples s'en allaient d'onduler… Et là, dans l'étang, passait en étincelles Un poisson doré. Bien que ne le vissent pas Les musiciens du bal, Du poisson doré, pourtant, et de lui seul Résonnait la musique. Dès que règne un silence Le poisson doré Jette sa lueur, et de nouveau se voit Un sourire parmi les hôtes. Et de nouveau, le violon sonne, La chanson retentit. L'Amour murmure dans les cœurs, Et le Printemps rit. Le regard chuchote au regard: «J'attends!» Si lumineux et passagèrement. Parce que lа, dans l'étang, Il est, le poisson doré… Traduit par Alexandra de Holstein et René Ghiln Призрачный набат/Le Tocsin-fantôme Je suis esprit, je suis le Tocsin-fantôme Qui des spectres seuls est entendu! Les maisons, je le sens, sont en flammes, Et les hommes restent prostrés en l'absence et l'oubli. Le feu, lourd de fumée, rampe et vers eux se coule, Et je suis tout entier un ulul de détresse, mais aphone!… Bourdonne donc, ô Cloche! sonne à toute volée, Et sois un cri parmi l'obscurité diffuse. D'airs épais elle rampe et serpente, la fumée: Comme une lourde bête va le charme nocturne. Et, ô quelle terreur pour moi, d'être muet Sous l'éparre cuivré de l'Incendie! |