Feu qui purifie! Feu fatidique, Beau, impérieux Vivant, et qui se luit! De silence dans le scintillement du cierge aux églises! De mille éclatements dans l'incendie! Sourd aux supplications, — à multiples aspects! Multicolore quand croulent les hautes murailles… Agile, et gai, et passionné, Si victorieusement beau Que lorsqu'il consume ce qui est à moi, Je ne puis pas ne pas voir sa beauté: O beau Feu, je t'avais consacré tous mes rêves! Tu te mues éternellement, Tu es autre partout. Tu es rouge, et fumeux, Dans le tourbillonnement du bûcher: Tu es tel qu'une fleur d'épouvante aux pétales de flammes, Tu es tel qu'une toison éclatante, qui se hérisse!… Tu brûles, dans les nues des tempêtes Violettes, fixement, — Parmi le grand bruit des tonnerres et le chant des pluies! Tu nais en l'incertitude des éclairs: Tantôt, qui surgissent en brisures, Tantôt, en une raie intacte, Tantôt ainsi qu'un globe qui s'entoure d'air irradié!… Je ne me lasserai pas de te louer, O soudain, ô terrible, ô insinuant! Par toi, l'on réduit les métaux. Près de toi, l'on crée et l'on forge Beaucoup de faux sonores Pour faucher, — pour faucher! Et beaucoup de bagues pour les doigts purs: Beaucoup de bagues pour enchaîner les vies, Pour qu'on les porte comme des chaînes durant de longues années, Et pour, de lèvres refroidies, le mot «aimer», Le répéter!.. Feu omniprésent! Je t'ai consacré tous mes rêves: Je suis comme toi! Oh! tu éclaires, tu réchauffes, tu brûles, — Tu vis, tu vis! Dans les temps vieux, en Serpent tu venais maintes fois, Et tu enlevais les Fiancées de l'autel. Et aussi, hôte perfide et persuasif, souvent, dans les vieux temps, Tu consolas l'épouse d'autrui… O brillant, ô brûlant, ô violent d'ardeur! Tu es brillant comme le diamant de douze couleurs, — Comme les yeux des chattes, caressants et féminins et qui attirent l'amour, Comme l'extase de la glauque vague des Océans Dans l'instant qu'elle se brise! — Comme une feuille du printemps sur quoi, une goutte de rosée tremble et oscille, — Comme le frémissement de rêve vert de la luciole, — Comme le scintillement des feux follets, — Comme l'extrémité des nuages allumés par la lumière du soir, Quand ils étendent leur deuil sur la face des jours brûlés, et qui s'éteignent!… Je me souviens, ô Feu! Comme tu me brûlas, Parmi les Sorcières qui frissonnaient des caresses de Toi. On nous tourmentait parce que nous avons pénétré le Mystère! On nous brûlait pour la joie du Sabbat de minuit: Mais, pour ceux qui ont vu ce que nous avions vu, Le Feu n'a pas d'épouvantes! Et je me souviens encore! Oh! je me souviens d'autre chose: des édifices flambants Où se donnaient au Feu, volontairement, dans la nuit sourde, Entourés d'infidèles qui ne voient pas, les Fidèles, qui étaient nous! Et, aux sons des prières, avec des cris de transport Nous chantions nos louanges au Donneur des Forces!… Je me souviens, ô Feu! et dès lors je t'ai aimé! Je sais, ô Feu! Qu'il est encore pour nous, un autre éclat de la lumière, Et qui brûle au regard des yeux à jamais éteints! Lui, il recèle la science subite. En lui sont la Terreur, et le délice, Devant la nouveauté incommensurable des Espaces… Les Espaces? Qui, de Lui-même les a tirés! Et d'où? Et pourquoi? Qui les a revêtus d'ornements innombrablement étoilés? Je partirai pour avoir la réponse… O âme de l'élément montant, qui t'élances dans les cieux, Je veux, que d'une lumière blanche et inextinguible S'allume pour moi — la Mort! Traduit par Alexandra de Holstein et René Ghil Лунное безмолвие/Le silence lunaire В лесу безмолвие возникло от Луны, Но внятно чудится дрожание струны, И свет властительный нисходит с вышины. Какая сонная над лесом красота, Как четко видится мельчайшая черта, Как стынет скованно вон та сосна и та. Воздушно-белые недвижны облака, Зеркально-царственна холодная река, И даль небесная во влаге глубока. Непрерываемо дрожание струны, Ненарушаема воздушность тишины, Неисчерпаемо влияние Луны. Dans la forêt le silence gagna sous l'apparition de la Lune, — Mais il semble qu'on entende sensiblement la vibration d'une corde, Et la lumière impérieuse descend des hauteurs. Au-dessus de la forêt, quelle beauté endormie! Combien nettement se distingue le moindre trait. Et combien rapidement s'immobilise ce pin, et cet autre. Immuables sont les nuages blancs, — aériens… Reine aux froideurs de miroir, la rivière, — Et le lointain céleste est profond dans l'humide. Ininterrompue, la vibration de corde, — Inviolable, la sublimité du silence, — Inépuisables, les puissances de la Lune! |