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– Malicorne! fit Montalais.

Puis, se baissant vers le jeune homme:

– Occupez Mme de Saint-Remy, soit en disputant, soit en vous raccommodant avec elle; il faut que je cause avec Louise.

Et, en même temps, une douce pression de main récompensait Malicorne de sa future obéissance. Malicorne se rapprocha tout grognant de Mme de Saint-Remy, tandis que Montalais disait à son amie, en lui jetant un bras autour du cou:

– Qu'as-tu? Voyons! Est-il vrai que tu ne m'aimerais plus parce que je brillerais, comme dit ta mère?

– Oh! non, répondit la jeune fille retenant à peine ses larmes; je suis bien heureuse de ton bonheur, au contraire.

– Heureuse! et l'on dirait que tu es prête à pleurer.

– Ne pleure-t-on que d'envie?

– Ah! oui, je comprends, je vais à Paris, et ce mot «Paris» te rappelait certain cavalier.

– Aure!

– Certain cavalier qui, autrefois, habitait Blois, et qui aujourd’hui habite Paris.

– Je ne sais, en vérité, ce que j'ai, mais j'étouffe.

– Pleure alors, puisque tu ne peux pas me sourire.

Louise releva son visage si doux que des larmes, roulant l'une après l'autre, illuminaient comme des diamants.

– Voyons, avoue, dit Montalais.

– Que veux-tu que j'avoue?

– Ce qui te fait pleurer; on ne pleure pas sans cause. Je suis ton amie; tout ce que tu voudras que je fasse, je le ferai. Malicorne est plus puissant qu'on ne croit, va! Veux-tu venir à Paris?

– Hélas! fit Louise.

– Veux-tu venir à Paris?

– Rester seule ici, dans ce vieux château, moi qui avais cette douce habitude d'entendre tes chansons, de te presser la main, de courir avec vous toutes dans ce parc; oh! comme je vais m'ennuyer, comme je vais mourir vite!

– Veux-tu venir à Paris?

Louise poussa un soupir.

– Tu ne réponds pas.

– Que veux-tu que je te réponde?

– Oui ou non; ce n'est pas bien difficile, ce me semble.

– Oh! tu es bien heureuse, Montalais!

– Allons, ce qui veut dire que tu voudrais être à ma place?

Louise se tut.

– Petite obstinée! dit Montalais; a-t-on jamais vu avoir des secrets pour une amie! Mais avoue donc que tu voudrais venir à Paris, avoue donc que tu meurs d'envie de revoir Raoul!

– Je ne puis avouer cela.

– Et tu as tort.

– Pourquoi?

– Parce que… Vois-tu ce brevet?

– Sans doute que je le vois.

– Eh bien! je t'en eusse fait avoir un pareil.

– Par qui?

– Par Malicorne.

– Aure, dis-tu vrai? serait-ce possible?

– Dame! Malicorne est là; et ce qu'il a fait pour moi, il faudra bien qu'il le fasse pour toi.

Malicorne venait d'entendre prononcer deux fois son nom, il était enchanté d'avoir une occasion d'en finir avec Mme de Saint-Remy, et il se retourna.

– Qu'y a-t-il, mademoiselle?

– Venez ça, Malicorne, fit Montalais avec un geste impératif.

Malicorne obéit.

– Un brevet pareil, dit Montalais.

– Comment cela?

– Un brevet pareil à celui-ci; c'est clair.

– Mais…

– Il me le faut!

– Oh! oh! il vous le faut?

– Oui.

– Il est impossible, n'est-ce pas, monsieur Malicorne? dit Louise avec sa douce voix.

– Dame! si c'est pour vous, mademoiselle…

– Pour moi. Oui, monsieur Malicorne, ce serait pour moi.

– Et si Mlle de Montalais le demande en même temps que vous…

– Mlle de Montalais ne le demande pas, elle l'exige.

– Eh bien! on verra à vous obéir, mademoiselle.

– Et vous la ferez nommer?

– On tâchera.

– Pas de réponse évasive. Louise de La Vallière sera demoiselle d'honneur de Madame Henriette avant huit jours.

– Comme vous y allez!

– Avant huit jours, ou bien…

– Ou bien?

– Vous reprendrez votre brevet, monsieur Malicorne; je ne quitte pas mon amie.

– Chère Montalais!

– C'est bien, gardez votre brevet; Mlle de La Vallière sera dame d'honneur.

– Est-ce vrai?

– C'est vrai.

– Je puis donc espérer d'aller à Paris?

– Comptez-y.

– Oh! monsieur Malicorne, quelle reconnaissance! s'écria Louise en joignant les mains et en bondissant de joie.

– Petite dissimulée! dit Montalais, essaie encore de me faire croire que tu n'es pas amoureuse de Raoul.

Louise rougit comme la rose de mai; mais, au lieu de répondre, elle alla embrasser sa mère.

– Madame, lui dit-elle, savez-vous que M. Malicorne va me faire nommer demoiselle d'honneur?

– M. Malicorne est un prince déguisé, répliqua la vieille dame; il a tous les pouvoirs.

– Voulez-vous aussi être demoiselle d'honneur? demanda Malicorne à Mme de Saint-Remy. Pendant que j'y suis, autant que je fasse nommer tout le monde.

Et, sur ce, il sortit laissant la pauvre dame toute déferrée comme dirait Tallemant des Réaux.

– Allons, murmura Malicorne en descendant les escaliers, allons, c'est encore un billet de mille livres que cela va me coûter; mais il faut en prendre son parti; mon ami Manicamp ne fait rien pour rien.

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