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Le duc s'aperçut de ce mouvement, qui n'échappa point non plus au comte.

– Sire, dit le duc, c'est M. de Monsoreau qui vient présenter ses hommages à Votre Majesté.

– Merci, monsieur, dit Henri; et je suis d'autant plus touché de votre visite que vous avez été bien blessé, n'est-ce pas?

– Oui, sire.

– À la chasse, m'a-t-on dit.

– À la chasse, sire.

– Mais vous allez mieux à présent, n'est-ce pas?

– Je suis rétabli.

– Sire, dit le duc d'Anjou, ne vous plairait-il pas qu'après nos dévotions faites, M. le comte de Monsoreau nous allât préparer une belle chasse dans les bois de Compiègne?

– Mais, dit Henri, ne savez-vous pas que demain?…

Il allait dire: «quatre de mes amis se rencontrent avec quatre des vôtres;» mais il se rappela que le secret avait dû être gardé, et il s'arrêta.

– Je ne sais rien, sire, reprit le duc d'Anjou, et si Votre Majesté veut m'informer…

– Je voulais dire, reprit Henri, que, passant la nuit prochaine en dévotions à l'abbaye Sainte-Geneviève, je ne serais peut-être pas prêt pour demain; mais que M. le comte parte toujours: si ce n'est demain, ce sera après-demain que la chasse aura lieu.

– Vous entendez? dit le duc à Monsoreau, qui s'inclina.

– Oui, monseigneur, répondit le comte.

En ce moment entrèrent Schomberg et Quélus; le roi les reçut à bras ouverts.

– Encore un jour! dit Quélus en saluant le roi.

– Mais plus qu'un jour, heureusement! dit Schomberg.

Pendant ce temps, Monsoreau disait, de son côté, au duc:

– Vous me faites exiler, à ce qu'il paraît, monseigneur.

– Le devoir d'un grand veneur n'est-il point de préparer les chasses du roi? dit en riant le duc.

– Je m'entends, répondit Monsoreau, et je vois ce que c'est. C'est ce soir qu'expire le huitième jour de délai que Votre Altesse m'a demandé, et Votre Altesse préfère m'envoyer à Compiègne que de tenir sa promesse. Mais, que Votre Altesse y prenne garde; d'ici à ce soir, je puis, d'un seul mot…

François saisit le comte par le poignet.

– Taisez-vous, dit-il, car, au contraire, je la tiens cette promesse que vous réclamez.

– Expliquez-vous.

– Votre départ pour la chasse sera connu de tout le monde, puisque l'ordre est officiel.

– Eh bien?

– Eh bien, vous ne partirez pas; mais vous vous cacherez aux environs de votre maison. Alors, vous croyant parti, viendra l'homme que vous voulez connaître; le reste vous regarde, car je ne me suis engagé à rien autre chose, ce me semble.

– Ah! ah! si cela se fait ainsi! dit Monsoreau.

– Vous avez ma parole, dit le duc.

– J'ai mieux que cela, monseigneur, j'ai votre signature.

– Eh! oui, mordieu, je le sais bien.

Et le duc s'éloigna de Monsoreau pour se rapprocher de son frère; Aurilly toucha le bras de d'Épernon.

– C'est fait, dit-il.

– Quoi? qu'y a-t-il de fait?

– M. de Bussy ne se battra point demain.

– M. de Bussy ne se battra point demain?

– J'en réponds.

– Et qui l'en empêchera?

– Qu'importe! pourvu qu'il ne se batte point.

– Si cela arrive, mon cher sorcier, il y a mille écus pour vous.

– Messieurs, dit Henri qui venait d'achever sa toilette, à Saint-Germain-l'Auxerrois!

– Et de là à l'abbaye Sainte-Geneviève? demanda le duc.

– Certainement, répondit le roi.

– Comptez là-dessus, dit Chicot en bouclant le ceinturon de sa rapière.

Et Henri passa dans la galerie, où toute sa cour l'attendait.

XXVII Lequel ajoutera encore à la clarté du chapitre précédent.

La veille au soir, quand tout avait été décidé et arrêté entre les Guise et les Angevins, M. de Monsoreau était rentré chez lui et y avait trouvé Bussy.

Alors, songeant que ce brave gentilhomme, auquel il portait toujours une grande amitié, pouvait, n'étant prévenu de rien, se compromettre cruellement le lendemain, il l'avait pris à part.

– Mon cher comte, lui avait-il dit, voudriez-vous bien me permettre de vous donner un conseil?

– Comment donc! avait répondu Bussy, je vous en prie, faites.

– À votre place, je m'absenterais demain de Paris.

– Moi! Et pourquoi cela?

– Tout ce que je puis vous dire, c'est que votre absence vous sauverait, selon toute probabilité, d'un grand embarras.

– D'un grand embarras? reprit Bussy regardant le comte jusqu'au fond des yeux, et lequel?

– Ignorez-vous ce qui doit se passer demain?

– Complètement.

– Sur l'honneur?

– Foi de gentilhomme.

– M. d'Anjou ne vous a rien confié?

– Rien. M. d'Anjou ne me confie que les choses qu'il peut dire tout haut, et j'ajouterai presque qu'il peut dire à tout le monde.

– Eh bien, moi qui ne suis pas le duc d'Anjou, moi qui aime mes amis pour eux et non pour moi, je vous dirai, mon cher comte, qu'il se prépare pour demain des événements graves, et que les partis d'Anjou et de Guise méditent un coup dont la déchéance du roi pourrait bien être le résultat.

Bussy regarda M. de Monsoreau avec une certaine défiance; mais sa figure exprimait la plus entière franchise, et il n'y avait point à se tromper à cette expression.

– Comte, lui répondit-il, je suis au duc d'Anjou, vous le savez, c'est-à-dire que ma vie et mon épée lui appartiennent. Le roi, contre lequel je n'ai jamais rien ostensiblement entrepris, me garde rancune, et n'a jamais manqué l'occasion de me dire ou de me faire une chose blessante. Et demain même, – Bussy baissa la voix, – je vous dis cela, mais je le dis à vous seul, comprenez-vous bien? demain je vais risquer ma vie pour humilier Henri de Valois dans la personne de ses favoris.

– Ainsi, demanda Monsoreau, vous êtes résolu à subir toutes les conséquences de votre attachement au duc d'Anjou?

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