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– J’ai là une clef de la petite porte, que j’ai fait faire par un serrurier de mes amis.

– Cela, en effet, simplifierait la besogne. Mais le secrétaire aussi a une clef.

– Oui, mais j’ai fait faire une clef de ce secrétaire avec une empreinte de la serrure sur un cachet de cire.

– Vous êtes fort ingénieux. Malheureusement, cela ne servira de rien. Je veux bien escalader les murs de Diane pour de l’amour, pas pour de l’argent. Dites au prince, puisque vous avez les clefs, qu’il fasse les choses lui-même.

– Le prince ne peut plus remettre les pieds chez Diane. Quant à grimper le long de la vigne, il n’a point l’agilité de vingt ans. Si vous étiez raisonnable, vous n’hésiteriez pas une seconde à accepter des propositions qui nous servent tous et qui servent celle que vous aimez à un point que vous ne soupçonnez pas. Si nous n’avons pas ces lettres demain, nous déposons une plainte au parquet.

– Oh! oh!

– Oui. Et vous pouvez sauver Diane d’elle-même. Pour cela, que faut-il? Grimper à un mur et recevoir dix mille francs!

– Dix mille francs, c’est un chiffre!

– Et savez-vous ce que vous pourriez en faire, de ces dix mille francs? Comme Diane sera libérée du prince, qui n’attend pour partir que ces lettres, elle serait toute disposée à vous être propice si vous lui offriez un joli petit voyage de quelques jours, où vous l’aimeriez tant qu’elle en oublierait toutes ses peines. Quant à moi, qui ai beaucoup d’influence sur elle, je me charge de l’y décider.

– Vous feriez cela?

– Je vous le jure.

Il y eut un silence.

– Hésitez-vous encore? demanda l’Homme de la nuit. Nous voici arrivés. Et il faut vous presser. Il s’agit de la sécurité de Diane et de votre bonheur! Dites oui ou non!

Pold hésitait encore, très perplexe.

La voiture était arrivée au 4 de l’avenue Prudhon et stationnait. L’Homme de la nuit ouvrit la portière.

– Allons! si vous n’êtes pas dans la chambre de Diane ce soir, je serai au parquet demain!

Pold fit un grand geste.

– J’accepte, dit-il.

L’Homme de la nuit lui donna ses dernières recommandations.

– Faites vite. Il n’y a personne dans la villa, Apportez-moi les lettres au bois de Misère, demain, à la villa des Pavots, où je vous attendrai.

Il fit descendre Pold, lui donna deux clefs, referma la portière, et la voiture s’éloigna au grand trot, laissant le jeune homme sur le trottoir, dans l’obscurité la plus profonde.

X COMMENT POLD SIGNE UN REÇU À L’HOMME DE LA NUIT

Adrienne avait repris quelque espoir. Une nouvelle lettre de son mari, plus affectueuse et lui annonçant sa proche arrivée, lui mit un peu de baume au cœur. D’autre part, les jours s’écoulaient. Arnoldson ne donnait pas signe de vie. On ne le rencontrait même point dans le pays.

Adrienne se disait qu’il avait fui après ses honteuses tentatives et ses dangereuses calomnies, et elle espérait bien qu’elle ne le reverrait jamais plus.

Le lendemain du jour où nous avons assisté à la représentation des Folies, Adrienne se promenait un peu moins angoissée, dans une allée du bois qui paraissait désert. Il était environ cinq heures du soir. Elle était seule.

Elle s’égara quelque peu dans le bois, puis elle se retrouva sur la route qui venait d’Esbly et montait, sous les arbres, jusqu’à la villa des Volubilis.

Adrienne s’attarda un peu sur cette route. Elle nourrissait le secret espoir que Lawrence arriverait ce soir-là et qu’elle serait la première à le voir et à lui souhaiter la bienvenue.

Son espoir sembla se réaliser, car elle vit poindre sur le sentier une silhouette. Elle pensa que Lawrence, dans un but de promenade, était venu à pied de la gare d’Esbly. Elle s’avança donc vers cette silhouette, qu’elle reconnut bientôt parfaitement.

C’était Pold!

Celui-ci avait quitté les Volubilis en donnant une vague explication à sa mère et en promettant de n’être pas plus de quarante-huit heures absent.

Adrienne se disait qu’elle allait avoir certainement des nouvelles du père.

Pold avait salué, de loin, joyeusement, sa mère, et celle-ci avait précipité sa marche.

Adrienne et Pold étaient en face de l’auberge Rouge.

Or, sur le seuil de cette auberge se tenait le noir qui en était à la fois le propriétaire, le patron et le domestique, qualités auxquelles il avait joint dernièrement celle de jardinier d’Arnoldson.

Joe était là et considérait les effusions auxquelles se livraient en toute sincérité Adrienne et son fils.

– Tu as des nouvelles de ton père, mon enfant? demandait Adrienne.

– Nullement, mère. Je ne l’ai point vu, mentit effrontément Pold, qui avait fort bien distingué son père dans la loge des Folies. Je ne viens pas de Paris, continua-t-il, mais d’Asnières, 0ù l’un de mes bons amis m’avait convié à une superbe partie de football.

La mère flairait bien quelque mensonge et quelque farce de jeunesse. Elle passa outre, indulgente.

– C’est que ton père m’avait écrit qu’il allait arriver, et je l’attends presque ce soir.

Elle ajouta, pendant que Pold lui offrait son bras:

– Je serais heureuse de vous avoir tous autour de moi.

– Maman chérie! fit Pold.

La maman chérie avait, comme nous l’avons dit, pris le bras de Pold. Sa main heurta quelque chose de dur qui gonflait le veston de Pold.

– Qu’est-ce que tu as donc dans tes poches, mon Pold, qui gonfle ainsi ton veston? demanda Adrienne.

Pold devint cramoisi et dit:

– Oh! rien… Ce sont des journaux de sport qui m’intéressent. Je m’en débarrasserai à la maison…

Et, ce disant, bien que la chose parût impossible, Pold rougit plus encore. Adrienne s’en aperçut et ne put s’empêcher de sourire.

– Ah! Pold, vous ne dites pas la vérité, ce qui est fort vilain. Mais gardez, monsieur, vos secrets; je ne veux pas les connaître.

Pold balbutiait:

– Mais non, m’man, je ne mens pas… Je t’assure que je ne mens pas…

À ce moment, ils aperçurent Joe sur la porte de l’auberge Rouge. Joe riait de toute sa dentition formidable…

Pold et Adrienne lui firent un signe de tête. Adrienne, se souvenant qu’il avait été fort aimable le soir où ils lui demandèrent l’hospitalité, voulut ne point passer sans lui adresser la parole.

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