Литмир - Электронная Библиотека
Содержание  
A
A

Et Arnoldson s’en alla.

Ses paroles semblaient avoir enlevé toute volonté à Martinet. Celui-ci, après le départ de l’Homme, se ressaisit, bondit vers Pold, et, arrachant son veston, son gilet, sa chemise, il mit la poitrine du jeune homme à nu.

Une plaie s’ouvrait au sternum…

Martinet appuya son oreille sur la poitrine de Pold.

Et Martinet se releva, radieux, avec un grand cri de joie:

– Il vit! Il vit!…

TROISIÈME PARTIE LA FOLIE DU CRIME

I CONVALESCENCE

Le soir tombait. Dans une chambre de l’hôtel de l’avenue Henri-Martin, Adrienne écoutait dormir Pold. Elle considérait le pâle visage de son fils et l’agitation de son sommeil.

Une femme de chambre apporta une lampe.

– Madame, il y a quelqu’un ici qui voudrait vous parler.

– Je n’y suis pour personne.

– Il insiste, madame. Il m’a dit que, lorsque vous sauriez son nom, vous le recevriez immédiatement.

– Ce nom?

– Il m’a dit qu’il s’appelait Martinet.

– Martinet! Faites-le entrer ici, dit Adrienne.

La bonne s’en alla. Adrienne se leva et alla à la fenêtre.

Quand elle se retourna, elle vit, sur le seuil de la chambre, Martinet, qui attendait une parole d’elle pour entrer.

Elle s’avança vivement vers lui.

– Entrez, monsieur, entrez, il me tardait de vous voir… J’ai tant de choses à vous dire, une telle reconnaissance à vous exprimer!

Martinet paraissait tout honteux:

– Madame, il n’y a pas de quoi… Et M. Pold? Il va mieux? dites… On m’a dit qu’il allait mieux.

– Oui, oui, beaucoup mieux.

Cette conversation avait lieu à voix basse. Martinet regardait le lit où reposait Pold.

– Alors, dites, il est sauvé?

– Oui. Le médecin m’a dit qu’il était sauvé, que nous n’avions plus rien à craindre… Ce n’est plus qu’une question d’un mois et demi au plus. Il était bien malade…

– Oui, madame, je le sais. Mais vos soins l’ont sauvé.

– Avant que je ne le sauve, il vous a dû son salut, monsieur Martinet. Vous étiez son ami, soyez le mien… Je n’aurai plus que vous d’ami en ce monde…

– Oh! madame, je ne sais vraiment…

Et, très ému, il continuait:

– Ah! Il y a un mois que je voulais le voir, ce bon Pold… Mais vous avez su que j’étais malade, n’est-ce pas, madame?… Les émotions… C’est ça… Eh bien! je ne suis pas fort, moi, contre les émotions… Et je suis tombé malade. C’est la première fois que je sors… J’ai voulu venir ici tout de suite… Mais vous savez que, tous les jours, j’envoyais chercher des nouvelles, en bas, chez votre concierge…

– Oui, je sais cela. J’aurais voulu aller vous voir, car je sais tout ce que vous avez fait pour nous. Malheureusement, je n’ai pas quitté le chevet de mon fils… Qui envoyiez-vous chercher des nouvelles de Pold?

– Mais c’était Mme Martinet elle-même qui passait, madame.

– Votre femme, monsieur Martinet! Que n’a-t-elle demandé à me voir, à voir Pold?… Que n’est-elle montée ici?…

– C’est moi qui le lui avais défendu, madame, fit Martinet d’une voix grave. Je n’ai pas voulu qu’elle vînt vous importuner…

Pold fit quelques mouvements.

Un mois s’était écoulé depuis les derniers événements qui se déroulèrent d’une façon si tragique dans la garçonnière de Pold.

Quand Martinet était sorti de la chambre funèbre, à la recherche d’un secours, il n’avait rencontré dans la maison âme qui vive.

Et il constata que l’homme qui se tenait devant la porte de la garçonnière, et qu’il avait frappé, ne l’avait pas été mortellement, puisque son corps n’était pas là. Il avait disparu.

Arnoldson avait fui. Il n’y avait plus, dans cette maison, que lui, Martinet, une femme évanouie, Pold expirant et deux cadavres.

Il sauta dans un fiacre et s’en fut à la recherche d’un médecin, qu’il ne trouva pas. Il perdait la tête. Il ne savait ce qu’il devait faire. Il voulait aller prévenir la police, mais il se rappelait les dernières paroles d’Arnoldson. Finalement, il revint rue de Moscou.

Quelle ne fut pas sa stupéfaction et sa terreur en voyant que les corps avaient disparu! On les avait enlevés.

Mais un mot laissé en évidence sur le lit, et qui lui était adressé, lui ordonnait de se rendre avenue Henri-Martin sur-le-champ.

Perdant de plus en plus la tête, il se fit conduire avenue Henri-Martin.

À la loge, il rencontra le père Jules, qu’il croyait aux Volubilis.

– Ah! quel malheur! geignait le brave homme.

Car le père Jules avait toujours passé pour un brave homme aux yeux de tout le monde.

– Où sont-ils? s’écria Martinet.

– Là-haut, monsieur Martinet. Comment! vous êtes déjà au courant?… On vient de les apporter… Ce pauvre monsieur! J’ai été chercher le docteur de la maison, qui est un bon ami et un excellent homme, et plein de savoir, monsieur Martinet… Il a fait déjà revenir à elle cette pauvre Mme Lawrence… Et il s’occupe de M. Pold!… Mais, pour sûr, celui-ci n’en réchappera pas!…

Martinet ne l’écoutait plus déjà, et avait bondi vers l’hôtel. Il passa sa nuit à aider le médecin dans les soins qu’il prodiguait à Pold et à sa mère.

On fit, par l’ordre d’Adrienne, le plus absolu silence sur ce drame de famille, et Lawrence fut inhumé, avec la complicité des médecins, sans que nul pût se douter qu’il s’était donné la mort.

Seule, la disparition de Diane fit beaucoup de bruit dans Paris. Les feuilles ne s’occupèrent que de cela pendant quinze jours. Finalement, comme on n’entendait plus parler du prince Agra, on en tira cette conclusion qu’elle avait quitté Paris avec lui, sans prévenir personne.

La première chose qu’Adrienne avait faite, quand elle eut retrouvé un peu de cette énergie qui était le fond de son caractère, avait été de renvoyer tous les domestiques et de les remplacer par d’autres qu’elle croyait sûrs.

Elle chassa le père Jules et envoya son remplaçant aux Volubilis, avec une dame de compagnie. Ils avaient l’ordre de faire patienter Lily, de s’opposer à son retour à Paris et, peu à peu, de la préparer – lourde et terrible tâche – à recevoir l’affreuse nouvelle de la mort subite de son père, déterminée, disait-on, par la rupture d’un anévrisme.

85
{"b":"125245","o":1}