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[113] Chacun pense être plus fin que les autres (MP 5).

[114] L'aveuglement des hommes est le plus dangereux effet de leur orgueil; il sert encore à le nourrir et à l'augmenter, et c'est pour manquer de lumières que nous ignorons toutes nos misères et tous nos défauts (MS 19, I 102).

[115] La constance en amour est une inconstance perpétuelle qui fait que notre cœur s'attache successivement à toutes les qualités de la personne que nous aimons, donnant tantôt la préférence à l'une, tantôt à l'autre, de sorte que cette constance n'est que notre inconstance arrêtée et renfermée dans un sujet (max. 175. I 184).

[116] Nous ne regrettons pas la perte de nos amis selon leur mérite, mais selon nos besoins et l'opinion que nous croyons leur avoir donnée de ce que nous valons (MS 70, I 248).

[117] Il n'y a point d'amour pure et exempte du mélange de nos autres passions, que celle qui est cachée au fond du cœur et que nous ignorons nous-mêmes (max. 69, I 79).

[118] On hait souvent les vices, mais on méprise toujours le manque de vertu (max. 186, I 195).

[119] La passion fait souvent du plus habile homme un sot et rend quasi toujours les plus sots habiles (max. 6, I 6).

[120] Il y a des gens niais qui se connaissent niais et qui emploient habilement leur niaiserie (max. 208, I 220).

[121] Tout le monde est plein de pelles qui se moquent des fourgons (MS 5. I 33).

[122] On ne saurait compter toutes les espèces de vanité (MP 6).

[123] Pour savoir, il faut savoir le détail des choses, et comme il est presque infini, de là vient que si peu de gens sont savants et que nos connaissances sont superficielles et imparfaites, et qu'on décrit les choses au lieu de les définir. En effet on ne les connaît et on ne les fait connaître qu'en gros et par des marques communes, de même que si quelqu'un disait que le corps humain est droit et composé de différentes parties, sans dire le nombre, la situation, les fonctions, les rapports et les différences de ces parties (max. 106, I 116).

[124] Il est bien malaisé de distinguer la bonté répandue et générale pour tout le monde de la grande habileté (MS 44, I 252).

[125] On incommode toujours les autres quand on est persuadé de ne les pouvoir jamais incommoder (max. 242, I 264).

[126] Les grandes et éclatantes actions qui éblouissent les yeux des hommes sont représentées par les politiques comme les effets des grands intérêts, au lieu que ce sont d'ordinaire les effets de l'humeur et des passions; ainsi la guerre d'Auguste et d'Antoine, qu'on rapporte à l'ambition qu'ils avaient de se rendre maîtres du monde, était un effet de la jalousie (max. 7, I 7).

[127] Les passions sont les seuls orateurs qui persuadent toujours; elles sont comme un art de la nature dont les règles sont infaillibles et l'homme le plus simple, qui sent, persuade mieux que celui qui n'a que la seule éloquence (max. 8, I 8).

[128] La vraie éloquence consiste à dire tout ce qu'il faut et à ne dire que ce qu'il faut (max. 250, I 273).

[129] Ceux qui se sentent du mérite se piquent toujours d'être malheureux pour persuader aux autres et à eux-mêmes qu'ils sont de véritables héros, puisque la mauvaise fortune ne s'opiniâtre jamais à persécuter que les personnes qui ont des qualités extraordinaires (max. 50, I 57).

[130] La coquetterie est le fond de l'humeur de toutes les femmes, mais toutes n'en ont pas l'exercice parce que la coquetterie de quelques-unes est arrêtée et enfermée par leur tempérament et par leur raison (max. 241, I 263).

[131] Un homme d'esprit serait souvent embarrassé sans la compagnie des sots (max. 140, I 142).

[132] Les pensées et les sentiments ont chacun un ton de voix, une action et un air de visage qui leur sont propres; c'est ce qui fait les bons et les mauvais comédiens, et c'est ce qui fait aussi que les personnes plaisent ou déplaisent (max. 255, I 278).

[133] Il y a de jolies choses que l'esprit ne cherche point et qu'il trouve toutes achevées en lui-même, de sorte qu'il semble qu'elles y soient cachées comme l'or et les diamants dans le sein de la terre (max. 101, I 111).

[134] La confiance de plaire est souvent le moyen de plaire infailliblement (MS 46, I 256).

[135] La faiblesse fait commettre plus de trahisons que le véritable dessein de trahir (max. 120, I 124).

[136] L'approbation que l'on donne à l'esprit, à la beauté et à la valeur les augmente et les perfectionne et leur fait faire de plus grands effets qu'ils n'auraient été capables de faire d'eux-mêmes (max. 150, I 156).

[137] Rien ne doit tant diminuer la satisfaction que nous avons de nous-mêmes, que de voir que nous avons été dans des états et dans des sentiments que nous désapprouvons à cette heure (max. 51, I 58).

[138] Nous n'avons pas assez de force pour suivre toute notre raison (max. 42, I 46).

[139] Ce qui nous fait aimer les connaissances nouvelles n'est pas tant la lassitude que l'on a des vieilles, ni le plaisir de changer, que le dégoût que nous avons de n'être pas assez admirés de ceux qui nous connaissent trop et l'espérance de l'être davantage de ceux qui ne nous connaissent guère (max. 178, I 187).

[140] Les grandes âmes ne sont pas celles qui ont moins de passions et plus de vertu que les âmes communes, mais celles qui ont seulement de plus grandes vues (MS 31, I 161).

[141] On n'est jamais si malheureux qu'on craint ni si heureux qu'on espère (MS 9, I 59).

[142] On se vante souvent mal à propos de ne se point ennuyer et l'homme est si glorieux qu'il ne veut pas se trouver de mauvaise compagnie (max. 141, I 143).

[143] Ce qui nous empêche souvent de bien juger des sentences qui prouvent la fausseté des vertus, c'est que nous croyons trop aisément qu'elles sont véritables en nous (MP 7).

[144] La santé de l'âme n'est pas plus assurée que celle du corps, et quelque éloignés que nous paraissions être des passions que nous n'avons point encore ressenties, il faut croire toutefois que l'on n'y est pas moins exposé qu'on l'est à tomber malade quand on se porte bien (max. 188, I 197).

[145] On blâme l'injustice, non pas par la haine qu'on a pour elle, mais par le préjudice qu'on en reçoit (MS 16, I 90).

[146] Un habile homme doit savoir régler le rang de ses intérêts et les conduire chacun dans son ordre; notre avidité le trouble souvent en nous faisant courir à tant de choses à la fois; de là vient que pour désirer trop les moins importantes, nous ne les faisons pas assez servir à obtenir les plus considérables (max. 66, I 76).

[147] Le caprice de l'humeur est encore plus bizarre que celui de la fortune (max. 45, I 50).

[148] La honte, la paresse, la timidité ont souvent toutes seules le mérite de nous retenir dans notre devoir, pendant que notre vertu en a tout l'honneur (max. 169, I 177).

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