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CCIII

Quand les vices nous quittent, nous voulons nous flatter que c'est nous qui les quittons.

CCIV

Il y a des rechutes dans les maladies de l'âme comme dans celles du corps. Ce que nous prenons pour notre guérison n'est le plus souvent qu'un relâche ou un changement de mal.

CCV

Les défauts de l'âme sont comme les blessures du corps: quelque soin qu'on prenne de les guérir, la cicatrice paraît toujours, et elles sont à tout moment en danger de se rouvrir.

CCVI

Ce qui nous empêche souvent de nous abandonner à un seul vice est que nous en avons plusieurs.

CCVII

Quand il n'y a que nous qui savons nos crimes, ils sont bientôt oubliés.

CCVIII

Ceux qui sont incapables de commettre de grands crimes n'en soupçonnent pas facilement les autres.

CCIX

Il y a des gens de qui l'on peut ne jamais croire de mal sans l'avoir vu; mais il n'y en a point en qui il nous doive surprendre en le voyant.

CCX

Le désir de paraître habile empêche souvent de le devenir.

CCXI

La vertu n'irait pas loin si la vanité ne lui tenait pas compagnie.

CCXII

Celui qui croit pouvoir trouver en soi-même de quoi se passer de tout le monde se trompe fort; mais celui qui croit qu'on ne peut se passer de lui se trompe encore davantage.

CCXIII

La pompe des enterrements regarde plus la vanité des vivants que l'honneur des morts.

CCXIV

Les faux honnêtes gens sont ceux qui déguisent la corruption de leur cœur aux autres et à eux-mêmes. Les vrais honnêtes gens sont ceux qui la connaissent parfaitement et la confessent aux autres.

CCXV

Le vrai honnête homme est celui qui ne se pique de rien.

CCXVI

La sévérité des femmes est un ajustement et un fard qu'elles ajoutent à leur beauté. C'est un attrait fin et délicat, et une douceur déguisée.

CCXVII

L'honnêteté des femmes est l'amour de leur réputation et de leur repos.

CCXVIII

C'est être véritablement honnête homme que de vouloir être toujours exposé à la vue des honnêtes gens.

CCXIX

La folie nous suit dans tous les temps de la vie Si quelqu'un paraît sage, c'est seulement parce que ses folies sont proportionnées à son âge et à sa fortune

CCXX

Il y a des gens niais qui se connaissent, et qui emploient habilement leur niaiserie.

CCXXI

Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit.

CCXXII

En vieillissant on devient plus fou, et plus sage.

CCXXIII

Il y a des gens qui ressemblent aux vaudevilles que tout le monde chante un certain temps, quelque fades et dégoûtants qu'ils soient.

CCXXIV

La plupart des gens ne voient dans les hommes que la vogue qu'ils ont, ou bien le mérite de leur fortune.

CCXXV

Quelque incertitude et quelque variété qui paraisse dans le monde, on y remarque néanmoins un certain enchaînement secret, et un ordre réglé de tout temps par la Providence, qui fait que chaque chose marche en son rang, et suit le cours de sa destinée.

CCXXVI

L'amour de la gloire et plus encore la crainte de la honte, le dessein de faire fortune, le désir de rendre notre vie commode et agréable, et l'envie d'abaisser les autres, font naître cette valeur qui est si célèbre parmi les hommes.

CCXXVII

La valeur dans les simples soldats est un métier périlleux qu'ils ont pris pour gagner leur vie

CCXXVIII

Ier état (et le deuxième, pour chaque variante, entre parenthèses). La parfaite valeur et la poltronnerie complète sont des (deux) extrémités où on en arrive rarement. L'espace qui est entre le deux (entre-deux) est vaste, et contient toutes les autres espèces de courage: il n'y a pas moins de différence entre eux (elles) qu'il y en a entre les visages et les humeurs; cependant ils (elles) conviennent en beaucoup de choses. Il y a des hommes qui s'exposent volontiers au commencement d'une action, et qui se relâchent et se rebutent aisément par sa durée. Il y en a qui sont assez contents quand ils ont satisfait à l'honneur du monde, et qui font fort peu de choses au-delà. On en voit qui ne sont pas (pas toujours) également maîtres de leur peur. D'autres se laissent quelquefois entraîner à des épouvantes générales. D'autres vont à la charge pour n'oser demeurer dans leurs postes; enfin il s'en trouve à qui l'habitude des moindres périls affermit le courage et les prépare à s'exposer à de plus grands. (Ici, une phrase ajoutée dans le 2e état: Il y en a encore qui sont braves à coups d'épée, qui ne peuvent souffrir les coups de mousquets; et d'autres y sont assurés, qui craignent de se battre à coups d'épée.) Outre cela il y a un rapport général que l'on remarque entre tous les courages de différentes espèces dont nous venons de parler, qui est que la nuit, augmentant la crainte et cachant les bonnes et les mauvaises actions, leur donne la liberté de se ménager. Il y a encore un autre ménagement plus général qui, à parler absolument, s'étend sur toutes sortes d'hommes: c'est qu'il n'y en a point qui fassent tout ce qu'ils seraient capables de faire dans une occasion (action) s'ils avaient une certitude d'en revenir. De sorte (De sorte qu'il est visible) que la crainte de la mort ôte quelque chose à leur valeur et diminue son effet.

CCXXIX

La pure valeur (s'il y en avait) serait de faire sans témoins ce qu'on est capable de faire devant le monde.

CCXXX

L'intrépidité est une force extraordinaire de l'âme par laquelle elle empêche les troubles, les désordres et les émotions que la vue des grands périls a accoutumé d'élever en elle; par cette force les héros se maintiennent en un état paisible, et conservent l'usage libre de toutes leurs fonctions dans les accidents les plus terribles et les plus surprenants.

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