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Certain désormais que le miracle est enfin accompli, Montalte esquisse un signe de tête pour indiquer qu’il prend acte de cette affirmation, et s’inclinant devant Espinosa prononce:

– Vos ordres, monseigneur?

– Monsieur le cardinal, répond l’inquisiteur, je suis venu d’Espagne à Rome tout exprès pour chercher un document portant la signature d’Henri III de France, ainsi que son cachet. Ce document est enfermé dans le petit meuble placé dans la chambre de Sa Sainteté. En l’absence du pape, nul ne peut pénétrer dans sa chambre… Nul… hormis vous, Montalte!… Ce document, reprend-il après une légère pause, ce document, il nous le faut.

Ce disant, Espinosa fixe Montalte droit dans les yeux.

Le cardinal répond froidement:

– C’est bien… Je vais le chercher.

Et il sort aussitôt d’un pas rude et violent.

Demeuré seul, Espinosa paraît plongé un moment dans une profonde méditation. Puis il s’approche de Fausta, la touche légèrement à l’épaule pour la réveiller, et dit:

– Êtes-vous assez forte, madame, pour m’entendre et me comprendre?

Fausta ouvre les yeux et les pose graves et lucides sur le visage de l’inquisiteur qui se contente de cette réponse muette et reprend:

– Avant mon départ, je veux, madame, vous rassurer sur le sort de votre enfant… Il vit… Et votre servante Myrthis doit, à l’heure qu’il est, avoir quitté Rome, emportant ce dépôt sacré que vous lui avez confié… Toutefois, ne croyez pas que Sixte Quint a laissé vivre cet enfant uniquement pour tenir le serment qu’il vous a fait… Si l’enfant vit, madame, c’est que Sixte sait que vous avez caché quelque part une somme de dix millions [2] et que ces millions, vous les avez légués à votre fils… Si Myrthis a pu quitter Rome sans encombre, c’est que Sixte sait que votre suivante connaît l’endroit où sont enfouis ces millions.

Espinosa s’arrête un moment pour juger de l’effet produit par sa révélation.

Fausta le fixe toujours de ses grands yeux noirs. Mais sur ce visage impassible, l’œil exercé de l’inquisiteur ne découvre pas la moindre trace d’émotion, et comme il veut savoir, il insiste:

– Vous m’avez entendu?… Vous m’avez bien compris?…

D’un signe, Fausta fait entendre qu’elle a compris.

Espinosa se contente encore une fois de cette réponse muette.

– C’est tout ce que je voulais vous dire, madame.

Il s’incline gravement, avec une sorte de déférence, et se dirige lentement vers la porte qu’il ouvre. Mais, avant de franchir le seuil, il se retourne et ajoute:

– Encore un mot, madame: le sire de Pardaillan a pu échapper à l’incendie du palais Riant… Pardaillan est vivant, madame!… Vous m’entendez?… Pardaillan… vivant!

Et cette fois, Espinosa sort tranquillement.

[2] Somme qui, à notre époque (vers 1910), représenterait environ vingt-cinq millions de francs. (Note de M. Zévaco).


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