Strophe II.
Nous ne méprisons point la bienveillante Kypris, car, avec Hèra, elle possède la plus grande puissance auprès de Zeus. On l'honore, la subtile déesse, source des biens vénérables. Le désir et la douce persuasion, à qui rien ne résiste, sont les compagnons de leur chère mère. Mais c'est à Harmonia que la Moire a donné le langage charmant d'Aphrodita et les entretiens amoureux.
Antistrophe II.
Je redoute les vents qui chassent les exilées, les douleurs cruelles et les guerres sanglantes. Pourquoi nos rapides persécuteurs ont-ils accompli une si prompte navigation? Que ce que la destinée a voulu arrive donc! La pensée de Zeus est infinie et inévitable. Que nous puissions au moins finir par des noces semblables à celles de tant d'autres femmes avant nous!
PREMIER DEMI-CHŒUR.
Grand Zeus! détourne de nous l'hymen des fils d'Aigyptos!
SECOND DEMI-CHŒUR.
Ceci serait pour le mieux; mais tu supplies un dieu inexorable.
PREMIER DEMI-CHŒUR.
N'ignores-tu pas les choses futures.
SECOND DEMI-CHŒUR.
Pourquoi vouloir pénétrer l'immense pensée de Zeus? Faites des vœux moins grands.
PREMIER DEMI-CHŒUR.
Pourquoi me donnes-tu ce conseil?
SECOND DEMI-CHŒUR.
Crains de pénétrer les choses divines.
PREMIER DEMI-CHŒUR.
Que le roi Zeus détourne de moi les noces odieuses de cet homme que je fuis, lui qui délivra Io de son mal, en la caressant heureusement de la main, et, par une douce violence, créa ainsi notre race!
SECOND DEMI-CHŒUR.
Qu'il accorde la victoire aux femmes! Que chacun ait sa part de bien et de mal, et que, par mes prières, la justice obtienne sa récompense légitime de la volonté tutélaire des dieux!
Les Perses
LE CHŒUR DES VIEILLARDS.
Voici ce qu'on nomme les fidèles, gardiens de ces riches demeures abondantes en or, les autres Perses étant partis pour la terre de Hellas. Le roi Xerxès, né de Daréios, les a choisis lui-même, à cause de leur vieillesse, pour veiller sur le royaume.
Mais déjà notre esprit est grandement troublé dans notre poitrine par de mauvais pressentiments, en songeant au retour du roi et de cette armée éclatante d'or.
Certes, toute la vigueur, née dans l'Asia, s'en est allée; et l'Asia triste regrette sa jeunesse; et aucun messager, aucun cavalier ne revient dans la ville royale des Perses.
Les Souziens, les Ekbataniens, et les habitants de la vieille citadelle de Kissia sont partis, les uns sur des chevaux les autres sur des nefs, et d'autres à pied, épaisse foule guerrière.
Tels sont partis Amistrès, et Artaphrénès, et Mégabazès, et Astaspès, chefs des Perses, rois soumis au grand roi, qui commandent les troupes innombrables, habiles archers, illustres cavaliers, à l'aspect terrible, et redoutables par leur intrépidité dans le combat;
Puis, Artembarès qui combat sur son char, et Masistrès, et l'excellent archer Imaios, et Pharandakès, et Sôsthanès, le conducteur de chevaux.
Le Néilos grand et fécondant en a envoyé d'autres: Sousiskanès, Pègastagôn l'Aigyptien, et le grand Arsamès chef de la sainte Memphis, et Ariomardos qui gouverne l'antique Thèba, et les habitants des marais, terribles et innombrables rameurs.
Puis est venue la multitude des Lydiens voluptueux, toute la race qui habite le continent, ceux que commandent Mètragathès et le brave Arcteus, chefs royaux, et que Sardès qui abonde en or envoie sur des chars sans nombre attelés de quatre ou de six chevaux, spectacle terrible.
Ceux qui habitent le Tmôlos sacré, Mardôn, Tharybis, et les Mysiens armés de piques, menacent de mettre au cou de Hellas le joug de la servitude.
Babylôn riche en or envoie ses peuples confusément mêlés, qui se ruent impétueusement, marins et habiles archers; et ainsi toute l'Asia, armée de l'épée, marche sous le commandement terrible du roi.
Telle, la fleur des hommes a quitté la terre Persique; et toute l'Asia qui les a nourris se lamente dans son regret amer; et les mères et les épouses, pleines d'angoisses, comptent longuement les jours.
Strophe I.
Déjà la royale armée, dévastatrice des villes, a passé sur la terre opposée. A l'aide de nefs liées par des cordes, elle a passé le détroit de l'Athamantide Hellè, ayant mis sur le cou de la mer cette route fixée par mille clous.
Antistrophe I.
Le chef belliqueux de la populeuse Asia pousse sur tout le pays de Hellas son immense armée, divisée en troupes de terre, en marins, appuyé par des chefs fermes et redoutables, tel qu'un dieu, et issu de la pluie d'or.
Strophe II.
Ayant l'œil sombre et sanglant du dragon, il pousse devant lui une innombrable multitude de bras et de nefs, et, monté sur son char Syrien, il porte, aux guerriers illustres par la lance Arès, le puissant archer.
Antistrophe II.
Certes, aucun héros ne soutiendra le choc de cet immense torrent de guerriers et n'arrêtera, à l'aide de barrières assez solides, l'irrésistible assaut de cette mer. Certes, l'armée et le peuple belliqueux des Perses sont invincibles.
Épôde.
Mais quel mortel peut échapper aux embûches rusées d'un dieu? Qui peut y échapper en bondissant d'un pied assez léger? Caressante d'abord, la fortune attire l'homme dans ses rets, et il ne lui est plus permis d'en sortir.
Strophe III.
Depuis longtemps une nécessité inévitable s'est manifestée parmi nous par la volonté des dieux, et c'est elle qui pousse les Perses à l'assaut des murailles, aux mêlées des cavaliers qui se réjouissent du combat et au renversement des villes.
Antistrophe III.
Ils ont appris à regarder la forêt de la mer large qui blanchit sous le souffle véhément de la tempête, confiants dans les câbles légers et les nefs qui transportent la foule des hommes.
Strophe IV.
C'est pourquoi mon esprit est plein d'épouvante. Hélas! cette armée des Perses! Puisse Sousis, la ville royale des Perses, vide de guerriers, ne point entendre ceci!