Maude Fleuret
La justice du cœur
Chapitre 1 : La vie en rose
Le claquement rythmé des talons d'Emma résonnait dans le couloir du prestigieux cabinet d'avocats Pearson & Hartley. Ses pas assurés la menaient vers son bureau, situé au 42ème étage d'une tour étincelante de Manhattan. Le soleil matinal se reflétait sur les baies vitrées, baignant l'open space d'une lumière dorée qui semblait n'être là que pour elle.
– Bonjour Emma ! Belle journée, n'est-ce pas ? lança Sarah, sa secrétaire, en lui tendant un gobelet de café fumant.
Emma lui adressa un sourire radieux. – Magnifique journée, Sarah. Comme toujours.
Et c'était vrai. Chaque jour semblait plus beau que le précédent dans la vie d'Emma Collins, 28 ans, la plus jeune associée de l'histoire du cabinet. Diplômée avec mention de Yale, elle avait gravi les échelons à une vitesse fulgurante, impressionnant ses pairs par son intelligence acérée et son travail acharné.
En pénétrant dans son bureau aux lignes épurées, Emma jeta un coup d'œil à la photo encadrée sur son bureau : elle et James, son fiancé, tout sourire devant la tour Eiffel. Dans trois mois exactement, ils se diraient "oui" lors d'une cérémonie somptueuse à Central Park. La bague de fiançailles à son doigt scintilla, comme pour lui rappeler ce bonheur imminent.
Emma s'installa à son bureau et alluma son ordinateur. Sa journée était chargée : deux rendez-vous avec des clients importants, une réunion stratégique avec les associés seniors, et la finalisation d'un contrat pour une fusion d'entreprises valorisée à plusieurs millions de dollars. Mais elle se sentait prête, comme toujours.
Son téléphone vibra. Un message de James :
N'oublie pas, dîner chez mes parents ce soir. Je t'aime.
Emma sourit. James Hartley, fils de l'un des fondateurs du cabinet, était l'homme parfait. Attentionné, brillant, et follement amoureux d'elle. Leur rencontre, trois ans plus tôt lors d'un gala de charité, avait été comme un coup de foudre. Depuis, ils formaient le couple en vue de la haute société new-yorkaise.
Elle se plongea dans ses emails, triant efficacement les urgences des tâches qui pouvaient attendre. Son esprit vif analysait chaque situation, anticipant les problèmes potentiels et élaborant déjà des stratégies. C'était ce don pour l'anticipation qui avait fait d'elle une avocate si redoutable.
À 10h précises, elle se leva pour son premier rendez-vous. Mr. Thompson, PDG d'une entreprise pharmaceutique en pleine expansion, l'attendait dans la salle de conférence. Emma ajusta son tailleur Chanel, vérifia rapidement son reflet dans la vitre – parfait, comme d'habitude – et se dirigea d'un pas décidé vers la réunion.
– Mr. Thompson, ravi de vous revoir, dit-elle en lui serrant fermement la main. J'ai étudié votre dossier en détail et j'ai quelques propositions qui, je pense, vont vous intéresser.
Pendant l'heure qui suivit, Emma exposa avec brio sa stratégie pour protéger les brevets de l'entreprise tout en maximisant ses opportunités d'expansion à l'international. Mr. Thompson, d'abord sceptique, fut rapidement conquis par la clarté de son exposé et la pertinence de ses arguments.
– Miss Collins, je dois avouer que je suis impressionné, conclut-il à la fin de la réunion. Vous avez dépassé mes attentes. Je signe où vous voulez.
Emma rayonnait intérieurement. Une victoire de plus à son actif. Elle raccompagna Mr. Thompson jusqu'à l'ascenseur, échangeant quelques plaisanteries sur le dernier match des Yankees.
De retour à son bureau, elle nota avec satisfaction que Sarah avait déjà préparé les documents pour la signature du contrat. – Que ferais-je sans vous, Sarah ? lança-t-elle avec un clin d'œil.
– Oh, probablement la même chose, mais avec un peu plus de stress, répondit sa secrétaire en riant.
Emma s'apprêtait à retourner à son travail quand on frappa à la porte. C'était Mr. Pearson en personne, le patriarche du cabinet.
– Emma, ma chère, pouvez-vous passer dans mon bureau ? J'ai une affaire… particulière à vous confier.
Intriguée, Emma le suivit. Qu'est-ce qui pouvait bien être si important pour que Mr. Pearson vienne la chercher en personne ?
Dans le bureau majestueux aux murs lambrissés, Mr. Pearson lui fit signe de s'asseoir. Son air grave inquiéta légèrement Emma.
– Emma, vous êtes notre meilleur élément. C'est pourquoi je pense que vous êtes la seule à pouvoir gérer ce dossier.
Il lui tendit une chemise en carton. Emma l'ouvrit et ses yeux s'écarquillèrent en voyant la photo qui ornait la première page. Un homme aux traits durs, le visage couvert de tatouages, la fixait d'un regard intense.
– Voici Jake Donovan. Un cas… complexe. Il est accusé de braquage à main armée, mais il clame son innocence. Le juge vous a désignée comme avocate commise d'office.
Emma sentit son cœur s'emballer. Un criminel ? Elle qui ne s'occupait que d'affaires civiles et de fusions-acquisitions ?
– Mais, Mr. Pearson, je n'ai aucune expérience en droit pénal…
Le vieil homme leva la main pour l'interrompre. – Je sais, Emma. Mais nous avons confiance en vous. Cette affaire pourrait avoir des… ramifications importantes. Nous avons besoin de quelqu'un de fiable, de discret, et d'extrêmement compétent.
Emma fixa à nouveau la photo de Jake Donovan. Quelque chose dans son regard la troublait, sans qu'elle puisse dire pourquoi.
– Très bien, Mr. Pearson. J'accepte.
Le vieux patriarche sembla soulagé. – Excellent. Je savais que je pouvais compter sur vous, Emma. Vous rencontrerez Mr. Donovan demain matin à la prison de Rikers Island. Tous les détails sont dans le dossier.
Emma quitta le bureau de Mr. Pearson, le dossier serré contre elle. Son esprit tournait à plein régime, essayant déjà d'anticiper les défis que cette nouvelle affaire allait lui poser. Elle n'avait jamais reculé devant un défi, et ce ne serait pas aujourd'hui qu'elle commencerait.
De retour à son bureau, elle plongea dans le dossier de Jake Donovan, absorbant chaque détail avec une concentration intense. Les heures passèrent sans qu'elle s'en rende compte, oubliant même de déjeuner.
Ce fut la voix de Sarah qui la tira de sa lecture. – Emma ? Il est presque 18h. Tu ne devrais pas te préparer pour ton dîner ?
Emma sursauta. Le dîner chez les parents de James ! Elle l'avait complètement oublié.
– Mon Dieu, Sarah, vous êtes un ange ! Que ferais-je sans vous ?
Elle rangea rapidement ses affaires, glissa le dossier Donovan dans son sac – elle l'étudierait ce soir après le dîner – et se précipita vers l'ascenseur.
Dans le taxi qui la conduisait vers l'Upper East Side, Emma tenta de se recentrer sur la soirée à venir. Les parents de James étaient des gens charmants, mais toujours un peu intimidants. Elizabeth Hartley, en particulier, avait des standards élevés pour son fils unique.
Le taxi la déposa devant une élégante maison de ville. Emma prit une profonde inspiration et sonna.
Ce fut James qui ouvrit la porte, son sourire chaleureux apaisant instantanément les nerfs d'Emma.
– Te voilà enfin, dit-il en l'embrassant tendrement. J'ai cru que tu allais me faire faux bond.
– Jamais de la vie, répondit Emma en lui rendant son baiser. Tu sais bien que je ne manquerais ça pour rien au monde.
James la conduisit au salon où ses parents les attendaient. Richard Hartley se leva pour l'accueillir chaleureusement, tandis qu'Elizabeth l'évaluait d'un œil critique mais bienveillant.
– Emma, ma chère, vous êtes resplendissante, dit Elizabeth en l'embrassant. Ce tailleur vous va à ravir.
– Merci, Elizabeth. Vous êtes très élégante vous aussi.
La conversation s'engagea naturellement, tournant autour des dernières nouvelles du cabinet, des préparatifs du mariage, et des projets de James pour développer la branche internationale de Pearson & Hartley.