Литмир - Электронная Библиотека
A
A

– Raymonde !... Raymonde !

Il se jeta sur elle et la pressa contre lui.

– Morte, fit-il.

Il y eut un moment de stupeur. Sholmès semblait confondu de son acte. Victoire balbutiait :

– Mon petit... Mon petit...

Beautrelet s’avança vers la jeune femme et se pencha pour l’examiner. Lupin répétait : « Morte... morte... » d’un ton réfléchi, comme s’il ne comprenait pas encore.

Mais sa figure se creusa, transformée soudain, ravagée de douleur. Et il fut alors secoué d’une sorte de folie, fit des gestes irraisonnés, se tordit les poings, trépigna comme un enfant qui souffre trop.

– Misérable ! cria-t-il tout à coup, dans un accès de haine.

Et d’un choc formidable, renversant Sholmès, il le saisit à la gorge et lui enfonça ses doigts crispés dans la chair. L’Anglais râla, sans même se débattre.

– Mon petit, mon petit, supplia Victoire...

Beautrelet accourut. Mais Lupin déjà avait lâché prise, et, près de son ennemi étendu à terre, il sanglotait.

Spectacle pitoyable ! Beautrelet ne devait jamais en oublier l’horreur tragique, lui qui savait tout l’amour de Lupin pour Raymonde, et tout ce que le grand aventurier avait immolé de lui-même pour animer d’un sourire le visage de sa bien-aimée.

La nuit commençait à recouvrir d’un linceul d’ombre le champ de bataille. Les trois Anglais ficelés et bâillonnés gisaient dans l’herbe haute. Des chansons bercèrent le vaste silence de la plaine. C’était les gens de la Neuvillette qui revenaient du travail.

Lupin se dressa. Il écouta les voix monotones. Puis il considéra la ferme heureuse où il avait espéré vivre paisiblement auprès de Raymonde. Puis il la regarda, elle, la pauvre amoureuse, que l’amour avait tuée, et qui dormait, toute blanche, de l’éternel sommeil.

Les paysans approchaient cependant. Alors Lupin se pencha, saisit la morte dans ses bras puissants, la souleva d’un coup, et, ployé en deux, l’étendit sur son dos.

– Allons-nous-en, Victoire.

– Allons-nous-en, mon petit.

– Adieu, Beautrelet, dit-il.

Et, chargé du précieux et horrible fardeau, suivi de sa vieille servante, silencieux, farouche, il partit du côté de la mer, et s’enfonça dans l’ombre profonde...

Notes :

↑ Arsène Lupin, gentleman-cambrioleur.

À propos de cette édition électronique

Ce livre électronique est issu de la bibliothèque numérique Wikisource[1]. Cette bibliothèque numérique multilingue, construite par des bénévoles, a pour but de mettre à la disposition du plus grand nombre tout type de documents publiés (roman, poèmes, revues, lettres, etc.)

Nous le faisons gratuitement, en ne rassemblant que des textes du domaine public ou sous licence libre. En ce qui concerne les livres sous licence libre, vous pouvez les utiliser de manière totalement libre, que ce soit pour une réutilisation non commerciale ou commerciale, en respectant les clauses de la licence Creative Commons BY-SA 3.0[2] ou, à votre convenance, celles de la licence GNU FDL[3].

Wikisource est constamment à la recherche de nouveaux membres. N’hésitez pas à nous rejoindre. Malgré nos soins, une erreur a pu se glisser lors de la transcription du texte à partir du fac-similé. Vous pouvez nous signaler une erreur à cette adresse[4].

Les contributeurs suivants ont permis la réalisation de ce livre :

Rikilabellevie

Laurent Jerry

Enmerkar

Yann

VIGNERON

Amarcord

Sapcal22

François

Coyau

Labé

Acélan

Yodaspirine

BeatrixBelibaste

↑ http://fr.wikisource.org

↑ http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/deed.fr

↑ http://www.gnu.org/copyleft/fdl.html

↑ http://fr.wikisource.org/wiki/Aide:Signaler_une_erreur

47
{"b":"273847","o":1}