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A
A

Les dieux ont protégé la ville de la déesse Pallas.

LE MESSAGER.

La ville d'Athèna est inexpugnable. Ses guerriers lui sont un ferme rempart.

ATOSSA.

Mais dis-nous le premier choc des nefs. Les Hellènes ont-ils commencé le combat, ou est-ce mon fils, orgueilleux du nombre de ses nefs?

LE MESSAGER.

Ô reine, un daimôn mauvais et vengeur a causé le premier tout le mal. Un Hellène, de l'armée des Athènaiens vint et dit à ton fils Xerxès que, dès les ombres de la nuit noire, les Hellènes ne resteraient pas, et que chacun d'eux, se rembarquant, chercherait son salut dans une fuite secrète. Aussitôt, Xerxès, ayant appris cela, et ne comprenant pas la ruse de cet Hellène et la jalousie des dieux, commanda à tous les chefs des nefs, dès que les rayons de Hèlios cesseraient de chauffer la terre et que les ténèbres envahiraient les demeures aithéréennes, qu'ils eussent à ranger la multitude des nefs sur trois lignes, à garder les passages et les détroits et à envelopper l'île d'Aias; de sorte que si les Hellènes réussissaient à fuir par quelque moyen, chaque chef le payerait de sa tête. Il commanda ainsi, plein de confiance et d'ardeur, ne sachant point ce qui lui était réservé par les dieux. Les Perses, sans désordre, et docilement, préparèrent le repas du soir, et chaque marin lia à son banc l'aviron par la courroie. La lumière du jour tomba et la nuit vint, et chaque rameur monta dans sa nef, et chaque hoplite aussi. La flotte se mit en ligne, les nefs naviguant dans l'ordre prescrit; et, pendant toute la nuit, ici et là, les chefs exercèrent les équipages des nefs. Et, la nuit s'écoulant, l'armée des Hellènes ne tentait nullement de quitter ce lieu par une fuite secrète. Dès que le jour aux chevaux blancs eut illuminé la terre, une immense clameur, telle qu'un chant sacré, s'éleva du milieu des Hellènes, et le son éclatant en rebondit au loin de toutes les côtes rocheuses de l'île, et la crainte envahit tous les barbares trompés dans leur espérance; car, alors, les Hellènes ne chantaient pas le paian sacré pour prendre la fuite, mais ils s'avançaient audacieusement au combat, et le son de la trompette excitait toute cette fureur. Aussitôt, à la voix de chaque chef, ils frappèrent de leurs avirons retentissants les eaux frémissantes de la mer, et voici que toutes leurs nefs nous apparurent. L'aile droite précédait en bon ordre, puis venait toute la flotte, et on entendait ce chant immense: – Ô enfants des Hellènes, allez! Délivrez la patrie, vos enfants, vos femmes, les demeures des dieux de vos pères et les tombeaux de vos aïeux! Maintenant, c'est le suprême combat!' – Et le cri de la langue Persique répondit à ce cri, car il n'y avait plus à hésiter. Les proues d'airain se heurtèrent. Une nef Hellénique brisa, la première, l'éperon d'une nef Phoinikienne, et les deux flottes se jetèrent l'une sur l'autre. D'abord, le torrent de l'armée Persique résista, mais quand la multitude de nos nefs fut resserrée dans les passages étroits, elles ne purent s'entre aider. Elles se heurtèrent de leurs proues d'airain et rompirent leurs rangs d'avirons; et les nefs Helléniques, nous enveloppant habilement, perçaient les nôtres qui se renversaient et couvraient la mer de débris de naufrage et de corps morts; et les rochers du rivage étaient pleins de cadavres, et toute l'armée barbare prit la fuite en désordre. A coups d'avirons brisés et de bancs de rameurs les Perses étaient écrasés ou déchirés comme des thons ou d'autres poissons pris au filet, et toute la mer retentissait de sanglots et de lamentations; et, enfin, l'œil de la nuit noire se ferma sur nous. Je ne pourrais, même en dix jours, te raconter la multitude de nos maux. Mais, sache-le, jamais en un seul jour tant d'hommes ne sont morts.

ATOSSA.

Hélas! une mer immense de maux s'est ruée sur les Perses et sur toute la race des barbares!

LE MESSAGER.

Certes, sache-le maintenant, je n'ai pas encore dit la moitié de nos maux. Une autre calamité deux fois plus lourde que celles que j'ai dites est tombée sur les Perses.

ATOSSA.

Quel malheur plus funeste est-il donc arrivé? Dis quelle est cette calamité dont tu parles et qui a frappé l'armée de maux encore plus terribles.

LE MESSAGER.

Tous ceux d'entre les Perses qui étaient les plus forts, les plus braves, les mieux nés, les plus fidèles au roi, ont misérablement subi une mort sans gloire.

ATOSSA.

Ô malheureuse! ô triste destinée pour moi, amis! De quelle mort ont-ils péri?

LE MESSAGER.

Il y a une île auprès des côtes de Salamis, petite, inabordable aux nefs que Pan, qui aime les danses, hante sur les bords de la mer. Xerxès les avait envoyés là afin que les ennemis, chassés de leurs nefs, s'étant réfugiés dans l'île, on égorgeât aisément ce qui survivrait de l'armée des Hellènes et qu'on pût sauver les nôtres des flots de la mer; mais il prévoyait mal ce qui devait arriver. En effet, quand un dieu eut donné la victoire à la flotte Hellénique, dans ce même jour, s'étant revêtus de leurs armes d'airain, ils sautèrent de leurs nefs et enveloppèrent l'île, afin que les Perses n'eussent plus aucune issue pour fuir. Et ceux-ci étaient assiégés d'une multitude de pierres, et ils périssaient sous les flèches envoyées par les nerfs des arcs. Enfin, se ruant tous à la fois, les Hellènes les tuaient, les égorgeaient et déchiraient les membres des malheureux, jusqu'à ce qu'ils eurent tous perdu la vie. Et Xerxès, voyant ce gouffre de maux, gémit, car il s'était assis, sur les bords de la mer, sur un haut promontoire d'où il pouvait voir toute l'armée. Mais, ayant déchiré ses vêtements et poussant de grands cris, il ordonna aussitôt à son armée de terre de se retirer, et lui-même prit une fuite soudaine. Telle est cette calamité que tu peux pleurer comme la première.

ATOSSA.

Ô funeste daimôn, combien tu as trompé l'espérance des Perses! Mon fils doit à l'illustre Athèna une amère défaite. Il n'a pas suffi des barbares que Marathôn a autrefois égorgés! C'est dans l'espérance de les venger que mon fils a subi un si lourd fardeau de malheurs. Mais parle, où as-tu laissé les nefs qui ont échappé à la destruction? Peux-tu le dire sûrement?

LE MESSAGER.

Les chefs des nefs encore sauves prirent confusément la fuite à l'aide du vent. Ce qui survivait de l'armée a péri sur la terre des Boiôtiens, les uns cherchant en vain l'eau des sources et souffrant la soif, tandis que les autres traversaient péniblement la terre des Phoikéens, et Dôris, et, vers le golfe Mèliaque, les champs que le Sperkhios arrose de ses douces eaux. Puis, nous avons gagné la terre Akhaienne et les villes Thessaliennes; et, là, beaucoup sont morts de faim et de soif, car l'une et l'autre nous tourmentaient. Puis, nous arrivâmes, par la terre Magnètique, le pays des Makédoniens, le cours de l'Axios, le marais couvert de roseaux de Bolbè et le mont Pangaios, au pays des Édôniens. Cette nuit-là, un dieu nous envoya un hiver précoce qui gela les eaux du Strymôn sacré. Alors, chacun de ceux qui auparavant niaient qu'il y eût des dieux, pria et adora Gaia et Ouranos. Après avoir mille fois invoqué les dieux, l'armée passa par cette route glacée, et ceux des nôtres qui purent passer avant que les rayons du dieu se fussent répandus eurent la vie sauve. En effet, l'orbe ardent et resplendissant de Hèlios échauffa bientôt de ses flammes le milieu du fleuve et le rompit, et tous roulèrent les uns sur les autres, et les plus heureux furent ceux qui rendirent l'âme le plus promptement! Les survivants se sauvèrent avec de grandes fatigues à travers la Thrèkè, mais bien peu sont revenus dans les foyers de la patrie. Que le royaume des Perses gémisse, regrettant sa très chère jeunesse! Ces choses sont vraies, mais je n'ai point dit la multitude des autres maux dont un dieu a accablé les Perses,

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