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D. – Au moment de sortir, à cinq heures, êtes-vous entrée dans votre chambre?

R. – Non, monsieur, c'est mon père qui est entré dans ma chambre, pour y chercher, sur ma prière, mon chapeau.

D. – Et il n'y a rien vu de suspect?

M. STANGERSON. – Évidemment non, monsieur.

D. – Du reste, il est à peu près sûr que l'assassin n'était pas encore sous le lit, à ce moment-là. Quand vous êtes partie, la porte de la chambre n'avait pas été fermée à clef?

Mlle STANGERSON. – Non. Nous n'avions aucune raison pour cela…

D. – Vous avez été combien de temps partis du pavillon à ce moment-là, M. Stangerson et vous?

R. – Une heure environ.

D. – C'est pendant cette heure-là, sans doute, que l'assassin s'est introduit dans le pavillon. Mais comment? On ne le sait pas. On trouve bien, dans le parc, des traces de pas qui s'en vont de la fenêtre du vestibule, on n'en trouve point qui y viennent. Aviez-vous remarqué que la fenêtre du vestibule fût ouverte quand vous êtes sortie avec votre père?

R. – Je ne m'en souviens pas.

M. STANGERSON. – Elle était fermée.

D. – Et quand vous êtes rentrés?

Mlle STANGERSON. – Je n'ai pas fait attention.

M. STANGERSON. – Elle était encore fermée…, je m'en souviens très bien, car, en rentrant, j'ai dit tout haut: «Vraiment, pendant notre absence, le père Jacques aurait pu ouvrir!…»

D. – Étrange! Étrange! Rappelez-vous, monsieur Stangerson, que le père Jacques, en votre absence, et avant de sortir, l'avait ouverte. Vous êtes donc rentrés à six heures dans le laboratoire et vous vous êtes remis au travail?

Mlle STANGERSON. – Oui, monsieur.

D. – Et vous n'avez plus quitté le laboratoire depuis cette heure-là jusqu'au moment où vous êtes entrée dans votre chambre?

M. STANGERSON. – Ni ma fille, ni moi, monsieur. Nous avions un travail tellement pressé que nous ne perdions pas une minute. C'est à ce point que nous négligions toute autre chose.

D. – Vous avez dîné dans le laboratoire?

R. – Oui, pour la même raison.

D. – Avez-vous coutume de dîner dans le laboratoire?

R. – Nous y dînons rarement.

D. – L'assassin ne pouvait pas savoir que vous dîneriez, ce soir-là, dans le laboratoire?

M. STANGERSON. – Mon Dieu, monsieur, je ne pense pas… C'est dans le temps que nous revenions, vers six heures, au pavillon, que je pris cette résolution de dîner dans le laboratoire, ma fille et moi. À ce moment, je fus abordé par mon garde qui me retint un instant pour me demander de l'accompagner dans une tournée urgente du côté des bois dont j'avais décidé la coupe. Je ne le pouvais point et remis au lendemain cette besogne, et je priai alors le garde, puisqu'il passait par le château, d'avertir le maître d'hôtel que nous dînerions dans le laboratoire. Le garde me quitta, allant faire ma commission, et je rejoignis ma fille à laquelle j'avais remis la clef du pavillon et qui l'avait laissée sur la porte à l'extérieur. Ma fille était déjà au travail.

D. – À quelle heure, mademoiselle, avez-vous pénétré dans votre chambre pendant que votre père continuait à travailler?

Mlle STANGERSON. – À minuit.

D. – Le père Jacques était entré dans le courant de la soirée dans la «Chambre Jaune»?

R. – Pour fermer les volets et allumer la veilleuse, comme chaque soir…

D. – Il n'a rien remarqué de suspect?

R. – Il nous l'aurait dit. Le père Jacques est un brave homme qui m'aime beaucoup.

D. – Vous affirmez, monsieur Stangerson, que le père Jacques, ensuite, n'a pas quitté le laboratoire? Qu'il est resté tout le temps avec vous?

M. STANGERSON. – J'en suis sûr. Je n'ai aucun soupçon de ce côté.

D. – Mademoiselle, quand vous avez pénétré dans votre chambre, vous avez immédiatement fermé votre porte à clef et au verrou? Voilà bien des précautions, sachant que votre père et votre serviteur sont là. Vous craigniez donc quelque chose?

R. – Mon père n'allait pas tarder à rentrer au château, et le père Jacques, à aller se coucher. Et puis, en effet, je craignais quelque chose.

D. – Vous craigniez si bien quelque chose que vous avez emprunté le revolver du père Jacques sans le lui dire?

R. – C'est vrai, je ne voulais effrayer personne, d'autant plus que mes craintes pouvaient être tout à fait puériles.

D. – Et que craigniez-vous donc?

R. – Je ne saurais au juste vous le dire; depuis plusieurs nuits, il me semblait entendre dans le parc et hors du parc, autour du pavillon, des bruits insolites, quelquefois des pas, des craquements de branches. La nuit qui a précédé l'attentat, nuit où je ne me suis pas couchée avant trois heures du matin, à notre retour de l'Élysée, je suis restée un instant à ma fenêtre et j'ai bien cru voir des ombres…

D. – Combien d'ombres?

R. – Deux ombres qui tournaient autour de l'étang… puis la lune s'est cachée et je n'ai plus rien vu. À cette époque de la saison, tous les ans, j'ai déjà réintégré mon appartement du château où je reprends mes habitudes d'hiver; mais, cette année, je m'étais dit que je ne quitterais le pavillon que lorsque mon père aurait terminé, pour l'académie des sciences, le résumé de ses travaux sur «la Dissociation de la matière». Je ne voulais pas que cette œuvre considérable, qui allait être achevée dans quelques jours, fût troublée par un changement quelconque dans nos habitudes immédiates. Vous comprendrez que je n'aie point voulu parler à mon père de mes craintes enfantines et que je les aie tues au père Jacques qui n'aurait pu tenir sa langue. Quoi qu'il en soit, comme je savais que le père Jacques avait un revolver dans le tiroir de sa table de nuit, je profitai d'un moment où le bonhomme s'absenta dans la journée pour monter rapidement dans son grenier et emporter son arme que je glissai dans le tiroir de ma table de nuit, à moi.

D. – Vous ne vous connaissez pas d'ennemis?

R. – Aucun.

D. – Vous comprendrez, mademoiselle, que ces précautions exceptionnelles sont faites pour surprendre.

M. STANGERSON. – Évidemment, mon enfant, voilà des précautions bien surprenantes.

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