Литмир - Электронная Библиотека
A
A

Mais entre l'instant où survient la CREQ et l'instant où le sujet se restabilise dans une autre prison, surviennent quelques moments de lucidité où il entrevoit ce que peut être la vraie liberté. Cela lui fait d'ailleurs très peur.

F olie

Individuellement, nous devenons tous chaque jour un peu plus fous et d'une folie différente les uns des autres. C'est pour cela que nous nous comprenons si mal. Je me sens moi-même atteint de paranoïa et de schizophrénie. Je suis en outre hyper-sensible, ce qui déforme ma vision de la réalité. Je le sais. Mais j'essaie, plutôt que de les subir, d'utiliser ces folies comme moteur de ce que j'entreprends. Plus je reussis, plus je deviens fou. Et plus je deviens fou, plus je réussis dans les objectifs que je me suis fixés. La folie est un lion furieux qu'il ne faut surtout pas tuer, il suffit de l'identifier, de le traquer, de le coincer, et d'y attacher une carriole.

Votre lion apprivoisé vous mènera alors bien plus loin que ne pourrons vous amener aucune école, aucun maître, aucune drogue, aucune religion. Mais comme toute source de puissance, il y a un risque à trop jouer avec sa propre folie: parfois la carriole, prise de vitesse, casse et le lion furieux se retourne conter celui qui voulait le piloter.

R ecettes pour créer de Brian Eno

1 – Briser les routines

2 – Tirer profit du hasard et des erreurs

3 – Penser en diagrammes

4 – Ne pas se laisser fasciner par la complexité et la technologie. La technologie est là pour être utilisée, c'est tout. Il ne faut pas rechercher la prouesse technique. Seule compte l'émotion.

5 – Rester dans l'art populaire. Si on ne parvient pas à plaire ni à se faire comprendre du grand public c'est de notre faute. La réaction du grand public est la pression la plus stimulante. Il ne sert à rien de prêcher dans le désert.

6 – Croire dans le pouvoir de l'art à influer sur la réalité. L'art est un moyen de comprendre comment fonctionne le monde et comment on fonctionne soi même.

7 – Persuader par la séduction plutôt que par l'agression. Une des fonctions de l'art est de présenter un monde désirable. Face à une représentation de bien-être et de beauté, on mesure tout ce que la réalité à d'imparfaite. Et on réfléchit naturellement aux moyens de supprimer les obstacles qui nous séparent de cette vision.

8 – Constituer un réseau de gens qui comprennent votre démarche et entretiennent des démarches similaires. En discutant avec les autres vous découvrirez des idées que vous n'auriez jamais conçues seul.

9 – Transporter sa culture avec soi. Et élaborer des hybrides avec les cultures extérieures.

H oméostasie

Toute forme de vie est en recherche d'homéostasie.

"Homéostasie" signifie équilibre entre milieu intérieur et milieu extérieur.

Toute structure vivante fonctionne en homéostasie. L'oiseau a des os creux pour voler. Le chameau a des réserves d'eau pour survivre dans le désert. Le caméléon change la pigmentation de sa peau pour passer inaperçu de ses prédateurs.

Ces espèces, comme tant d'autres, se sont maintenues jusqu'à nos jours en s'adaptant à tous les bouleversements de leur milieu ambiant. Celles qui ne surent pas s'harmoniser avec le monde extérieur ont disparu.

L'homéostasie est la capacité d'autorégulation de nos organes par rapport aux contraintes extérieures.

On est toujours surpris de constater à quel point un simple individu peut endurer les épreuves les plus rudes et y adapter son organisme. Durant les guerre, circonstances où l'homme est contraint de se surpasser pour survivre, on a vu des gens qui n'avaient jusque là connu que confort et tranquillité se mettre sans rechigner au régime eau et pain sec. En quelques jours, les citadins perdus en montagne apprennent à reconnaître les plantes comestibles, à chasser et manger des animaux qui leur avaient toujours répugné: taupes, araignées, souris, serpents…

"Robinson Crusoe" de Daniel Defoe ou "L'Ile mystérieuse" de Jules Verne sont des livres à la gloire de la capacité d'homéostasie de l'être humain.

Tous, nous sommes en perpétuelle recherche de l'homéostasie parfaite car nos cellules ont déjà cette préoccupation. Elles convoitent en permanence un maximum de liquide nutritif à la meilleure température et sans agression de substance toxique. Mais quand elles n'en disposent pas, elles s'adaptent. C'est ainsi que les cellules du foie d'un ivrogne sont mieux accoutumées à assimiler l'alcool que celles d'un abstinent. Les cellules des poumons d'un fumeur fabriqueront des résistances à la nicotine. Le roi Mithridate avait même entraîné son corps à supporter l'arsenic.

Plus le milieux extérieur est hostile, plus il oblige la cellule ou l'individu à développer des talents inconnus.

B actérie

Bactérie, tel est le nom de notre plus ancien arrière -arrière- grand-père.

Et voilà aussi le nom de la structure organique qui a régné le plus longtemps et le plus largement sur Terre.

Si notre planète est âgée d'environ 5 milliards d'années, la première bactérie, une archébactérie, est apparue il y a 3,5 milliards d'années. Pendant 2 milliards d'années, l'archébactérie et ses dérivés sont restés seuls à s'"amuser" sur la Terre. Les seuls à se battre, à se nourrir, à se reproduire. Combien de belles épopées bactériennes, combien de drames, combien de bonheurs bactériens demeureront à jamais ignorés de nous, plus récents occupants de la croûte terrestre…

Dans le coeur de tout homme, il y a une bactérie qui sommeille.

Ce n'est qu'après que notre Terre ait déjà parcouru les trois quarts de son existence jusqu'à nos jours (un quart dans le silence, deux quarts avec des bactéries pour seuls habitants) qu'apparaît la première cellule à noyau. C'est une vraie révolution dans la vie. Jusque là, les gènes se promenaient en vrac dans la cellule. Lorsqu'ils se réunissent en noyau, un programme cohérent peut enfin se bâtir.

Les bactéries donnent donc naissance à une branche évoluée: les algues bleues. Contrairement à leurs ancêtres, elles aiment l'oxygène, la lumière du soleil, elles sont l'avenir.

Plus ça avance, plus ça avance vite.

Les algues bleues donnent naissance à des formes de vie de plus en plus sophistiquées. Les insectes apparaissent il y a 250 millions d'années. Les hommes, bons retardataires, ont pointé le bout de leur museau il y a bien trois millions d'années.

Quant aux bactéries qui n'ont pas su évoluer, elles ont toujours horreur de l'oxygène. Alors elles restentent tapies au fond des terres, des mers, et même de nos intestins.

R ecette du corps humain

Vous n'êtes pas simplement un nom et un prénom, dotés d'une histoire sociale. Voici votre véritable composition.

Vous êtes 71% d'eau claire, 18% de carbone, 4% d'azote, 2% de calcium, 2% de phosphore, 1% de potassium, 0, 5%de soufre, 0, 5% de sodium, 0, 4% de chlore. Plus une bonne cuillerée à soupe d'oligo-éléments divers: magnésium, zinc, manganèse, cuivre, iode, nickel, brome, fluor, silicium. Plus encore une petite pincée de cobalt, aluminium, molybdène, vanadium, plomb, étain, titane, bore.

Voilà la recette de votre existence.

Tous ces matériaux proviennent de la combustion des étoiles et on peut les trouver ailleurs que dans votre propre corps. Votre eau est similaire à celle du plus anodin des océans. Votre phosphore vous rend solidaire des allumettes. Votre chlore est identique à celui qui sert à désinfecter les piscines.

Mais vous n'êtes pas que cela.

Vous êtes une cathédrale chimique, un faramineux jeu de construction avec ses dosages, ses équilibres, ses mécanismes d'une complexité à peine concevable. Car vos molécules sont elles-mêmes constituées d'atomes, de particules, de quarks, de vide, le tout lié par des forces électromagnétiques, gravitationnelles, électroniques, d'une subtilité qui vous dépasse.

7
{"b":"125169","o":1}