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И вряд ли случайно то, что Агнесса Сорель была воспитана при дворе короля Рене как придворная дама его жены Изабеллы Лотарингской и что именно здесь Карл познакомился с ней. Анжуйский двор мог тогда лучше всего, видимо, подготовить женщину к роли явной и едва ли не официальной возлюбленной в духе новой куртуазности.

Тем же духом проникнуто и сочинение нашего автора, с энтузиазмом писавшего о том, что было у всех на слуху и что отвечало его душевным влечениям. Столь выразительно поэтому он в конце просит «поклонников любовной рифмы, что чтят ее больше латыни», помолиться за его душу, но сделать это «вечером, не дожидаясь утра: ведь ночью их любовь разнежит так, что, как предписано природой, спать утром будут долго и пропустят время для молитвы» (245–246). Как видим, казус сомюрской джостры 1446 г., воспроизведенный в исследованном сочинении, можно рассматривать в качестве одного из ярких свидетельств зарождения в то время «новой куртуазности».

Le «Pas de Saumur» (1446) et l'auteur de sa relation poétique{624}

Le manuscrit de Saint Pétersbourg est le seul témoignage historique des splendides festivités que le roi René organisa au cours de l'été 1446 dans son château de Saumur. Le clou de la fête fut une compétition de chevaliers que, depuis le XVIIe siècle, on appelle, dans la littérature traditionnelle, un «tournoi», mais qui pour les participants et les spectateurs était non un tournoi, mais une joute. En France, la différence entre ces deux formes de jeux de combat a été, dès le XVIIe siècle, passablement oubliée, ce que facilita sans doute l'interdiction des tournois promulguée dans le pays au milieu du XVIe siècle après le tournoi malheureux où le roi Henri II fut blessé mortellement. Au XVe siècle, on savait bien que le tournoi était un combat entre deux groupes de chevaliers et écuyers, tandis que la joute était une série de combats singuliers, où on n'entrait effectivement en lice que deux par deux. Aussi l'auteur de notre texte, en décrivant le concours de 1446, n'utilise pas le terme de tournoi et ne lui donne qu'une seule fois le nom de «joustes ou tournois» (str. 37), où l'emploi du mot «tournoi» lui permet de conserver le rythme.

L'un des participants, le sénéchal d'Anjou et de Provence Louis de Beauvau, quand il l'évoque dans son œuvre poétique consacrée à une autre joute, organisée plus tard par le roi René à Tarascon («le pas de la bergère»), l'appelle aussi «joute», exactement comme le concours de Tarascon.{625} Et le roi René, dans le Livre des tournois où il décrit justement l'organisation et le déroulement des tournois, souligne que leurs participants «se vont bâtant par troppeaux».{626}

À leur tour les joutes se différencient entre elles selon l'organisation des jeux. Au XVe siècle en France, les joutes appelées «pas» ou «pas d'armes» étaient particulièrement populaires. Dans ce cas les organisateurs délimitaient un certain «pas» ou passage et exigeaient de tous les nobles habilités à combattre, de se mesurer avec eux pour recevoir le droit de passer. Un pas d'armes caractéristique fut celui de «L'Emprise de la Gueule du dragon», auquel le roi René prit part à l'automne 1446, et qui est brièvement décrit au début du manuscrit de Pétersbourg. Les organisateurs, quatre nobles chevaliers, firent savoir que sur le route de Rasilly à Chinon les dames et les demoiselles ne pouvaient passer qu'accompagnées de nobles chevaliers qui devaient se mesurer avec les défenseurs du pas («les tenants») et rompre avec eux deux lances (str. 10).

Il est curieux que Voltaire, qui avait dans sa bibliothèque une édition de Vulson de la Colombière avec une description détaillée des deux joutes de 1446, en fasse mention dans l'Essai sur les mœurs en affirmant que c'est justement le roi René qui était le législateur du «pas d'armes» en France{627}. L'affirmation, bien sûr, est inexacte mais tout à fait intéressante. Grâce à Vulson, et en fin de compte au manuscrit de Pétersbourg dont il reproduit le contenu, le «pas d'armes», pour bien des générations suivantes, se trouva étroitement lié au nom de ce roi.

L'année de la joute de Saumur, 1446, a son intérêt{628}. Comme l'écrit notre auteur, c'était:

En l'an après que le desroy
Des guerres fut mis en arroy… (str. 9)

Il pense à la trêve de deux mois conclue entre le roi Charles VII et les Anglais en mai 1444 et qui se prolongea jusqu'en 1449. Cette trêve fut particulièrement importante pour le roi René, dans la mesure où, lors de sa conclusion, fut obtenu des ambassadeurs anglais un accord sur le mariage de sa fille Marguerite avec le roi d'Angleterre Henry VI, mariage qui eut lieu en 1445. La même année, il marie sa fille Yolande à Ferry, comte de Vaudémont, ou de Lorraine, qui participa avec son épouse aux fêtes de Saumur de 1446.

Le chroniqueur Mathieu d'Escouchy écrit à propos de cette annéelà:

«Et pendant le temps de l'an Ц46 dessusdit, à cause de ce que les trêves d'entre les Franchois et les Anglois se entretenaient assez seurement, et que les seigneurs et nobles hommes n'avoient mis grant occupation pour le fait de la guerre, se commancerent à mettre sus plusieurs joustes de par le Roy de France, les princes et grans seigneurs, et aussy aultres esbatemens de grans coustaiges et deepens, affin de entretenir leur gens sur l'exercice des armes, et aussy pour passer temps plus joyeusement. Et entre les aultres, les Roys de France et de Sicile (René d'Anjou) … en firent et souffrirent faire pluseurs et de diverses manières en pluseurs lieux, qu 'il y avoit certain nombre de chevaliers ou nobles à garder ung pas, qui estoit desnommé par propre nom, contre tous iceulx qui aler ou passer y verroient».{629} 

Ici le chroniqueur se trompe en supposant que Charles VII participa lui aussi à la joute de Saumur. C'est à son instigation que furent organisées quelques joutes dont celle de Nancy en 1445 qu'il honora effectivement de sa présence. Mais il est caractéristique que la joute de Saumur à ses yeux éclipsait toutes les autres. Le bruit qu'elle fit s'en répandit si loin que dans la pensée des observateurs étrangers, pendant un certain temps, tous les concours de chevalerie de quelque importance semblaient s'être déroulés à Saumur.

Les fêtes commencèrent le 26 juin et devaient durer 40 jours. Mais quand ce délai fut écoulé, on les prolongea de deux jours et elles prirent fin le dimanche 7 août. Il est vrai que l'auteur de notre texte indique le 8 août, mais le 8 août était cette année-là un lundi, et il dit lui-même que la fête se termina un dimanche (str. 1999, 213).

Mais où se déroula-t-elle? La question est importante puisque à ce propos se sont constituées deux légendes assez tenaces qui ne sont confirmées ni par des documents ni par notre texte. D'abord, à la suite de Lecoy de La Marche, toute une série d'auteurs affirment que tout se passa dans le château de Launay, non loin de Saumur{630}. Ce château avait été acquis par le roi René peu de temps auparavant, en 1444. Mais, ni dans les documents conservés, ni dans notre texte ce château n'est indiqué comme lieu de déroulement des festivités. Au contraire, dans le manuscrit de Pétersbourg, l'auteur parle à plusieurs reprises du château de Saumur (str. 3, 31), et dans les comptes que l'on a conservés, le spectacle est mentionné seulement sous le nom de «pas de Saumur». Comme le fait remarquer Ch. de Mérindol, le roi René, après avoir acheté Launay, y entreprit de grands travaux de restauration et au moment de la joute, ces travaux battaient leur plein{631}. Aussi était-il impossible d'y organiser une joute. Lecoy de La Marche a apparemment confondu les comptes qui concernent le coût de ces travaux avec le coût de l'organisation de la joute.

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