Je connais des lieux qui respirent
L'air du temps, les souv'nirs
Le vécu
On y vient parce que l'on y boit
On laisse pour ce que l'on voit
Un écu
Ceux qui entrent sans savoir apportent
Et laissent à l'heure où ils sortent
Leurs pensées
Qui adhèrent aux murs et aux meubles
Semblent partir et puis veulent
Y rester
Dans ces endroits, moi j'aime l'envers
Du décor une fois vos verres
Desservis
Je joue au petit criminel
Qui promène son opinel
Dans vos vies
Ouvrez les yeux car où que j'aille
Je laisse derrière moi des entailles
Des rayures
Et les gravats qu'il me reste
Servent à combler ma tristesse
Mes fêlures
Qui était à ma place?
Laisserai-je des traces?
Moi aussi! Moi aussi!
C'est pourquoi j'occupe mes loisirs
A graver partout "I was here"
Des traces de premiers rendez-vous
Ceux qui donnent le rose aux joues
Et des paupières
Battant l'air comme des papillons
Soul'vant dans un tourbillon
La poussière
Tout cela se propage et donne
Peut-être pas un cyclone
Jusqu'en Chine
Mais laisse dans l'air alentour
Un frisson qui parcourt
Notre échine
Et lorsque nous étions à l'école
Nous collions déjà nos chewing-gums
Sous les chaises
Plus tard les premières galoches
Et l'addition sur l'écorce
D'un vieux chêne
Ces gentilles délinquances
N'évit'ront pas les vacances
Eternelles
Mais ces coeurs et rectangles
Sont un peu notre langue
Maternelle
Pour dire…
Qui était à ma place?
Laisserai-je des traces?
Moi aussi! Moi aussi!
C'est pourquoi j'occupe mes loisirs
A graver partout "I was here"
Qui était à ma place?
Laisserai-je des traces?
Moi aussi! Moi aussi!
C'est pourquoi j'occupe mes loisirs
A graver partout "I was here"
"I was here"
Aurais-je imaginé que je me trouv'rais là
Une mine de stylo plantée sur ma peau?
Hanhan
Les yeux de mon bourreau qui ne me quittent pas
Ma blancheur lui fait peur, je sais qu'il cherche ses mots
Hanhan
Je suis une feuille blanche, je ne demandais rien
Qu'à rester sur mon arbre et attendre la fin
Moi j'aimais le vent se perdant dans mes feuilles
Le murmure de la sève qui me donnait la vie
Moi j'aimais la hauteur que j'avais sur les choses
Je n'ai pas vu venir la lame qui m'a trahie
Si au moins je servais de papier officiel
Pour signer des traités et protéger les faibles
Hanhan
Ou être dans les mains d'un poète oublié
Qui me jett'rait ses vers comme on cherche un ami
Hanhan
J'aurais pu être pressée sur le coeur d'une enfant
Ecoutant dans mes lignes la voix de son amant
Ou être le pliage d'un gamin de huit ans
Et voler dans les airs sous les rires des enfants
Ou être dans les pages d'un livre d'histoire
Qui dit que le chemin est encore tellement long
Mais voilà que je sens que la plume me frôle
Et les lettres se forment comme l'encre tourbillonne
Hanhan
J'n'ai jamais vu plus lourd que le poids de ces mots
C'est la misère d'un homme que je sens sur mon dos
Hanhan
Il dit "Je veux finir d'avecques ma vie
Pardonne-moi mon amour mais je m'arrête ici
Ce n'est pas de ta faute si je baisse les bras
Mais j'ai perdu ma chance de gagner ici-bas"
Et moi c'était mon rôle de porter tous ces mots
Et les larmes d'une femme tomb'ront sur moi bientôt
J'aurais pu être pressée sur le coeur d'une enfant
Ecoutant dans mes lignes la voix de son amant
Ou être le pliage d'un gamin de huit ans
Et voler dans les airs sous les rires des enfants
Mais je tourne la page d'une triste histoire
Qui dit que le chemin n'était pas tellement long
Pas tellement long
Pas tellement long…
Une guêpe s'envole, se pose, butine
Et l'image cogne à ma rétine
Mais déjà mon regard est loin
Je n'sais plus voir le quotidien
J'aim'rais m'réveiller sans mémoire
Redécouvrir c'que j'peux plus voir
J'ai écrit une petite annonce
Un mois déjà: pas de réponse
Cherche regard neuf sur les choses
Cherche iris qui n'a pas vu la rose
Je veux brûler encore une fois
Au brasier des premières fois
Je veux revoir ma première fleur
L'accompagner jusqu'à c'qu'elle meure
Et découvrir une flaque d'eau
Comme une porte pour descendre en haut
J'irai dimanche à Orly-Sud
Voir le métal s'prendre pour une plume
Ouvrant les doigts, joignant mes pouces
J'verrai mon ombre lui faire la course
Cherche regard neuf sur les choses
Cherche iris qui n'a pas vu la rose
Je veux brûler encore une fois
Au brasier des premières fois
Sentant les sons comme pris au piège
Je devin'rai mes premières neiges
Battant des mains comme un enfant
J'm'entendrai rire "Eh! C'est tout blanc!"
Je veux poursuivre des nuages noirs
Au grand galop sur les trottoirs
Sous la tourmente, au mur du vent
Les parapluies deviennent vivants
Cherche regard neuf sur les choses
Cherche iris qui n'a pas vu la rose
Je veux brûler encore une fois
Au brasier des premières fois
Mais j'ai croisé sur mon chemin
Deux grands yeux bleus, deux blanches mains
Ses menottes ont pris mes poignets
Et ce sont ses yeux qui m'ont soigné
Des parapluies se sont ouverts
Un grand avion a fendu l'air
A deversé ses doux flocons
Tout était blanc… tout… non
A nos pieds brillait quelque chose
Et mes yeux ont reconnu la rose
Et j'ai brûlé tout contre toi
Au brasier d'une première fois