Gérard de Nerval Caligula Ier chant L'hiver s'enfuit; le printemps embaumé Revient suivi des Amours et de Flore; Aime demain qui n'a jamais aimé, Qui fut amant, demain le soit encore! Hiver était le seul maître des temps, Lorsque Vénus sortit du sein de l'onde; Son premier souffle enfanta le printemps, Et le printemps fit éclore le monde. L'été brûlant a ses grasses moissons, Le riche automne a ses treilles encloses, L'hiver frileux son manteau de glaçons, Mais le printemps a l'amour et les roses. L'hiver s'enfuit, le printemps embaumé Revient suivi des Amours et de Flore; Aime demain qui n'a jamais aimé, Qui fut amant, demain le soit encore! IIème chant De roses vermeilles Nos champs sont fleuris, Et le bras des treilles Tend à nos corbeilles Ses raisins mûris. Puisque chaque année Jetant aux hivers Sa robe fanée, Renaît couronnée De feuillages verts, Puisque toute chose S'offre à notre main Pour qu'elle en dispose, Effeuillons la rose, Foulons le raisin; Car le temps nous presse D'un constant effort; Hier la jeunesse, Ce soir la vieillesse, Et demain la mort. Étrange mystère! Chaque homme à son tour Passe solitaire Un jour sur la terre; Mais pendant ce jour, De roses vermeilles Nos champs sont fleuris, Et le bras des treilles Tend à nos corbeilles Ses raisins mûris. IIIème chant César a fermé la paupière; Au jour doit succéder la nuit; Que s'éteigne toute lumière, Que s'évanouisse tout bruit. A travers ces arcades sombres, Enfants aux folles passions, Disparaissez comme des ombres, Fuyez comme des visions. Allez, que le caprice emporte Chaque àme selon son désir, Et que, close après vous, la porte Ne se rouvre plus qu'au plaisir. (Recueil: Odelettes)
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